Page:La Motte-Fouqué - Ondine, Hachette, 1913.djvu/34

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ce tour, dit-il. Elle va nous laisser maintenant dans une mortelle inquiétude jusqu’à demain matin : pourvu seulement qu’il ne lui arrive pas de mal !

— Essayons encore de la rejoindre, proposa le chevalier.

— Inutile, répliqua le pêcheur. Je ne saurais permettre que vous risquiez votre vie à rechercher cette petite folle, et, pour moi, mes vieilles jambes n’en peuvent plus. D’ailleurs, comment savoir la direction qu’elle a prise ?

— Du moins appelons-la, supplions-la de revenir.

Et Huldbrand lança aux échos le nom gracieux de la jeune fille. Le vieillard hochait la tête en disant que la petite était bien trop entêtée pour répondre et que tous les moyens du monde ne serviraient de rien ; pourtant, il ne pouvait lui-même s’empêcher de mêler ses appels à ceux du chevalier et de crier :

— Ondine ! reviens pour cette fois, je t’en prie !

Cependant, il en arriva comme le pêcheur l’avait dit : Ondine ne répondit pas ni ne parut. Les deux hommes, de guerre lasse, reprirent le chemin de la maisonnette. La bonne mère était allée se coucher, et, dans l’âtre, le feu s’éteignait lentement. Le vieux pêcheur ranima les cendres, ajouta du bois et posa sur la table une cruche de vin :

— Vous avez aussi de l’inquiétude au sujet de cette enfant, dit-il au chevalier ; nous ferions donc mieux de passer ici une partie de la nuit à causer et à boire, plutôt que de nous étendre sur nos lits pour n’y point dormir.