Page:La Nature, 1873.djvu/198

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
190
LA NATURE.

et avec raison, que l’homme assez ingénieux pour mettre la main sur de semblables découvertes n’attendra pas que l’on fonde des prix, quels qu’ils soient, pour les mettre au jour ? Si ses procédés sont réellement efficaces, il lui suffira de les breveter, et les millions afflueront dans sa caisse. M. de Douhet a-t-il en outre bien médité sur le problème de la force mécanique produite sans charbon ? On est tout aussi loin de le résoudre avec les ressources actuelles de la science que de trouver la pierre philosophale.

Le printemps perpétuel. — M. Malapert vient nous donner le moyen de faire le printemps perpétuel, et de produire à volonté la pluie et le beau temps. Que les incrédules lisent la petite brochure qu’il vient de publier, et ils seront convaincus ! Le moyen consiste à changer le cours des fleuves chauds de l’Océan, à détourner le Gulf-stream par exemple, en construisant au sein des mers des îlots artificiels, et à diriger ainsi vers des pays déterminés ces artères calorifiques du globe terrestre. Pour obtenir la pluie, il faut arracher à l’aide de puissants moyens mécaniques des montagnes de glace des mers polaires, et les remorquer dans des directions déterminées, où elles fourniront à l’air par leur fusion, des torrents de vapeur d’eau. On voit que ces méthodes sont ingénieuses… au point de vue théorique. Mais ne faudrait-il pas les compléter en donnant à l’humanité le moyen pratique de construire des îles et de transporter des montagnes ?

Le lac Okeechobee. — C’est le nom indien d’un lac à peine connu qui est dans le sud de la Floride, et qui vient d’être visité par un intrépide explorateur, M. G.-K. Allen, de Sainte-Marie, accompagné de quatre autres voyageurs. Le New-York Herald publie les récits de cette pérégrination difficile, qu’on croirait empruntée aux légendes de Sindbad le marin. Le lac Okeechobee est protégé par une zone de marécages bourbeux et de fondrières, à travers lesquels il est fort dangereux de s’engager. Malgré les difficultés et les périls, les voyageurs atteignirent les ondes du lac, dont la longueur est de 65 milles et la largeur de 30 milles. Ils découvrirent trois îles au milieu de cette immensité d’eau. L’une d’elle est bordée de rochers immenses entassés pèle-mêle, offrant le spectacle d’un chaos indescriptible ; d’énormes falaises se dressent sur d’autres points. Au sud, les voyageurs trouvèrent une magnifique forêt, où des acajous séculaires s’élevaient compactes et touffus à côté de magnolias-lauriers. Au milieu de ces bois, vivent eu grand nombre des araignées gigantesques, qui n’ont pas moins de deux pieds de longueur. Ces mygales ont des membres puissants, leurs yeux sont entourés d’un cercle jaune ponceau très-brillant. Le corps est cerclé de bandes jaunes, noires, et ponceau très-brillantes. — M. G.-K. Allen et ses compagnons ont découvert dans cette île curieuse des masses de pierres, amoncelées régulièrement, comme les restes d’une construction humaine. Le lac Okeechobee est situé à 45 milles de la baie de Jupiter sur la côte de l’Atlantique et à 200 milles de Sainte-Augustine.

Les défenses fossiles de mammouths livrées au commerce. — On a souvent trouvé en Sibérie, à la baie Escholtz, de nombreuses défenses d’animaux antédiluviens et particulièrement des défendes de mammouth. On a même découvert, comme le lecteur ne l’ignore pas, des squelettes entiers dans un état de conservation suffisant pour laisser voir des traces de crins ou poils qui recouvraient la peau de ces animaux. Dès que ces gisements de défenses furent connus, la spéculation tenta de s’en emparer ; on puisa largement dans ces amas mis en réserve par la nature. De Russie, ce produit antédiluvien fut exporté en Angleterre, où dernièrement un navire arriva de Revel avec un chargement complet, qui excita pendant quelque temps la curiosité des visiteurs, dans les docks de Londres. Les plus grandes défenses mesurent 3 mètres de long et ont un diamètre maximum de 18 centimètres ; leur poids est d’environ 100 kilogrammes. L’ivoire n’est pas d’aussi bonne qualité que celui des dents mêmes de l’éléphant d’Afrique, et il est probable que le séjour dans la terre pendant une longue succession de siècles l’a singulièrement détérioré. — Ce stock de défenses s’est cependant vendu à raison de 1 250 francs la tonne.

Statistique de la poste anglaise. — Pendant l’année 1872, le nombre des bureaux de poste a été augmenté de 300, ce qui porte le total à 12 200 ; il y a en outre 700 boites aux lettres sur la voie publique. Le nombre des lettres transportées en 1871 s’est élevé à 915 600 000 ; dans ce chiffre il faut comprendre 99 000 000 d’imprimés. 3 600 000 lettres sont tombées au rebut par suite d’erreur d’adresse. 15 000 lettres ont été jetées dans les boites sans aucune suscription.

Fétidité de l’eau de la Clyde. — La Clyde, qui possède une réputation universelle pour ses chantiers de construction navale, a une eau aussi fétide que les égouts de fumier croupis au soleil. À Glascow, ou quai de Bromie-law, la poussière aqueuse soulevée par les aubes des bateaux à vapeur exhale une odeur repoussante ; on voit, même par un temps froid, des bulles de gaz se dégager du fond vaseux de la rivière. La Tamise, dont l’eau est réputée si nauséabonde, n’est pas à comparer à celle de la Clyde ; la marée vient quotidiennement entraîner les dépôts qui s’y forment, tandis que la propagation de la marée atteint difficilement Glascow ; elle est retardée par les sinuosités de l’estuaire et des lacs qui précèdent. Cette rivière si petite, mais source d’une si grande prospérité pour ses industrieux riverains, n’est cependant pas malsaine, puisque les épidémies sont rares sur ses bords.

La vie dans l’obscurité. — Pendant la nuit d’hiver passée dans les parages polaires par l’expédition suédoise à bord du Polhem, M. Kjellmann, botaniste de l’expédition, fut frappé de trouver des algues en pleine vigueur au sein des ténèbres les plus opaques. La sonde ramena également des mollusques vivant sans lumière dans une eau glaciale. On fut tenté de croire qu’il existait certaines sources de lumière inconnue. Pour vérifier ce fait, on descendit dans un appareil spécial une plaque sensibilisée par les procédés photographiques, qu’on laissa séjourner vingt-quatre heures sur le fond de la mer où l’on rencontrait ces animaux et les végétaux. Elle n’offrit, quand on la retira, aucune trace d’impression lumineuse. Cette expérience prouve donc encore une fois qu’il existe des animaux et des végétaux organisés de telle façon que la lumière leur est inutile ; elle leur serait peut-être même nuisible, puisqu’il faut un milieu propre à chaque sujet pour que son existence soit assurée.

Orage du 9 août à Nîmes. — Cet orage, d’une violence extraordinaire, a fondu, à sept heures du soir, sur Nîmes. Un vent semblable à un cyclone a en un instant jonché le sol de branches d’arbres, démoli deux baraques de saltimbanques sur la place des Arènes et un grand nombre de celles qu’on avait dressées pour la foire sur l’esplanade ; celles du côté est, ont renversé en tombant la balustrade con-