Page:La Nature, 1873.djvu/199

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
191
LA NATURE.

tre laquelle elles s’appuyaient. Le nombre de vitres brisées par la grêle est incalculable. Les grêlons étaient en grande partie gros comme des noix ; quelques-uns mêmes atteignaient la dimension d’un œuf. Les moineaux francs qui cherchaient chaque soir un abri sous le feuillage touffu des platanes de l’avenue ont tous péri. Dès que la pluie a cessé, on s’est occupé de les ramasser et on peut dire, sans crainte d’exagération, que l’on en a trouvé de 3 à 4 000. Heureusement l’orage n’a duré qu’un quart d’heure et son rayon semblait assez circonscrit ; mais partout où il a passé, la récolte de raisins et d’olives peut être considérée comme perdue. (Messager du Midi.)

Trombes marines. — On a observé, le 20 juillet, sur la petite rade de Cronstadt, un phénomène atmosphérique extrêmement rare dans nos parages. Trois trombes s’avançaient à la fois de la pleine mer vers la côte d’Oranienbaum. L’une de ces trombes formait un type complet du phénomène, c’est-à-dire que son entonnoir d’en haut se réunissait à l’entonnoir renversé formé à la surface de l’eau. Les deux autres étaient des demi-trombes, n’ayant que l’entonnoir supérieur. Les trois trombes ont disparu en s’approchant du rivage. (Messager de Cronstadt.)



CORRESPONDANCE

M. Thaunaron, président de la Chambre consultative d’agriculture de Valence, nous écrit une lettre fort intéressante sur les désastres causés par le phylloxéra dans le département de la Drôme. Ce département, qui récolte annuellement pour 18 ou 20 millions de francs de vin, est condamné cette année à voir baisser sa production dans une proportion effroyable. M. Thaunaron nous informe que les articles publiés dans la Nature ont été très-appréciés et très-utiles, dans les régions particulièrement atteintes. Il nous demande de nouveaux renseignements sur des travaux récents, concernant le terrible ennemi des vignes. Le désir de notre correspondant ne tardera pas à être satisfait. Nous ne saurions trop insister sur une question qui touche de si près à de grands intérêts nationaux.



ACADÉMIE DES SCIENCES

Séance du 11 août 1873. — Présidence de M. de Quatrefages.

L’éminent M. Laurence Smith présente une nouvelle note sur le gisement de corindons de l’Amérique du Nord, gisement qui, pour son étendue superficielle, comme pour l’abondance et la pureté de ses produits, est le plus important que l’on connaisse. Un bloc isolé, trouvé en 1846, a fourni la première indication de son existence ; mais ce n’est qu’en 1865 que le minéral a été rencontré in situ. L’exploitation s’en fait maintenant sur une large échelle dans un but industriel : le corindon remplace l’émeri.

— L’une des plus grandes et des plus riches cavernes de l’âge du renne vient d’être découverte dans le département des Hautes-Pyrénées. Sous une couche épaisse de stalagmites, dont la formation a été beaucoup plus active dans cette localité que celle des stalactites, un dépôt considérable de matériaux incohérents renferme une quantité extraordinaire d’objets d’industrie de cette époque paléo-archéologique et d’ossements d’ours (l’ours actuel des Pyrénées), de loup, de renne, de chamois, de bouquetin, de bœuf, de cheval, de coq de bruyère, etc. Le cerf abonde plus que le renne, mais celui-ci est caractéristique. On a trouvé sur un bois de cerf l’image gravée du coq de bruyère. — Il y a là, dit-on, dans des conditions d’extraction facile, des centaines de mètres de ce précieux dépôt.

— Le savant M. Trécul, qui a la parole pour lire un mémoire sur, ou plutôt contre la théorie carpellaire, dépose son manuscrit sur la tribune et se rendant au tableau, expose ses idées de vive voix et en s’aidant du dessin, méthode pour l’adoption de laquelle nous faisons des vœux., La théorie carpellaire ramène la composition du fruit à celle de la feuille ; le fruit (l’ovaire) est une feuille ; par des exemples empruntés aux renonculacées, le laborieux botaniste précité combat cette manière de voir. Son argument nous paraît se résumer en ce fait principal que ni par le nombre, ni par la disposition, les nervures des carpelles ne sont en conformité avec celles des folioles. La prétendue feuille carpellaire n’est donc pas une feuille. L’auteur conclut que le fruit est un organe d’une nature toute particulière destiné à remplir une fonction spéciale, comme la feuille en remplit une autre qui est celle de la respiration.

Stanislas Meunier.


EXPLORATION DE LA PALESTINE

L’esprit de recherche religieuse, qui est la conséquence immédiate du protestantisme, a déterminé de nombreuses explorations individuelles dans les terres bibliques ; Robinson, Lynck, Munck, de Saulcy, ont laissé des travaux remarquables. Mais il importait, pour la science archéologique, de produire un ouvrage d’ensemble, entrepris sous une direction régulière, s’étendant à toute la Palestine et comprenant la géographie, la géologie, l’histoire naturelle et la description des ruines antiques. On constitua en Angleterre une société : Palestine Exploration Fund, qui fit appel à l’initiative individuelle pour obtenir les capitaux nécessaires à la réalisation de cette grande entreprise. Depuis plusieurs années, on s’est mis à l’œuvre ; les documents les plus importants sur l’histoire de ce berceau de la civilisation ont déjà rémunéré les patients investigateurs. Les dépenses se sont élevées, depuis le commencement des opérations, à 20 000 livres sterling ; un cinquième de la Palestine est relevé, et décrit. Il reste 1615 milles à relever pour avoir terminé la Palestine, qui s’étend entre le Dan et Beersheba, et d’un autre côté entre le Jourdain et la mer, sur une surface de 6 600 milles géographiques. On dresse tous les mois la carte de 140 à 170 milles carrés.

Les opérations n’ont lieu que pendant la belle saison. On a commencé par mesurer une base près de Jenin, où la position astronomique avait été déterminée rigoureusement. Ce fut le point de départ de la brigade du lieutenant Couder. Les explorateurs campent pendant trois semaines aux mêmes endroits, choisis à une distance d’environ 12 milles les uns des autres ; le camp est ainsi le point de ralliement des opérations exécutées dans son rayon, qui embrasse 60 à 150 milles de superficie aux alentours. Le pre-