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LA NATURE.

répéter simplement l’expérience de Faraday d’une manière un peu différente ; mais il voulait étudier ce qui se passe lorsque l’on continue d’appliquer à la manivelle une force suffisante pour entretenir le mouvement de rotation du disque. On observe alors que, lorsque le courant passe, il faut, pour maintenir la même vitesse, développer un effet considérable, produire un travail mécanique que l’on peut évaluer et qui atteint une valeur très-notable. Que devient ce travail mécanique qui n’est pas nécessaire pour maintenir la vitesse de rotation, à proprement parler et qui n’est rendu indispensable que par l’effet du courant ? Foucault pensait que, conformément aux idées qui étaient nouvelles à l’époque où il construisait son appareil, ce travail mécanique devait être transformé en chaleur ; l’expérience justifie complètement cette prévision et l’on observe que, en forçant le disque à tourner lors du passage du courant, on parvient à élever sa température d’une quantité appréciable à la main, on peut même atteindre le point de fusion de la cire, en prolongeant l’expérience pendant deux minutes et en employant le courant produit par six éléments Bunsen.

Tel était l’état de cette question, au moins dans les points les plus importants, et depuis l’appareil de Foucault aucune particularité notable n’avait été signalée, relativement à l’action des aimants sur le cuivre en mouvement, lorsque M. Le Roux présenta l’appareil dont nous voulons parler actuellement, et étudia ce qu’il appelle : l’induction péripolaire.

Sur une table solidement construite sont portées par des pieds en fer quatre bobines recouvertes de fil de cuivre isolés ; ces fils peuvent être reliés à une pile par l’intermédiaire du commutateur C, qui permet d’interrompre le courant ou de fermer le circuit à volonté. Des noyaux de fer doux sont placés au centre des bobines ; leurs extrémités dépassent les bobines et constituent les pôles des électro-aimants lorsque le courant passe. Un disque en cuivre rouge DD’ est placé dans le plan de symétrie de l’appareil, parallèlement aux axes des bobines.

Ce disque peut tourner autour d’un axe horizontal qui passe entre les extrémités opposées des fers doux et dont on voit l’extrémité en A. À cette même extrémité se trouve le dernier pignon qui sert à transmettre au disque D le mouvement de rotation produit par la manivelle, mouvement qui atteint plus de 180 tours à la seconde, soit 10 000 tours à la minute. Aux extrémités des noyaux de deux bobines opposées, et par-dessous, sont fixées deux pièces de fer doux F’, entre lesquelles passe, sans les toucher, le disque de cuivre D. Lorsque l’appareil est ainsi disposé, il constitue un puissant appareil de Foucault, avec lequel on peut répéter les expériences que nous avons indiquées plus haut. Mais, en outre, et par-dessus les noyaux des électro-aimants, on peut placer deux pièces de fer doux F analogues à celles que nous venons de signaler en dessous ; lorsque ces pièces sont posées et que, comme les pièces F’, elles sont aimantées par leur contact avec les électro-aimants, le disque D est, dans toute son étendue, soumis à l’action d’un champ magnétique présentant la plus grande symétrie dans toutes les directions. Dans ce cas, on observe que la rotation du disque est aussi facile lorsque le courant passe que lorsque le circuit est interrompu ; que l’on n’éprouve pas alors la résistance qui est si manifeste dans l’appareil de Foucault, que le disque ne s’échauffe pas d’une manière sensible.

Cependant, le courant électrique passe ; dans la pile, du zinc est dissous : il y a donc une énergie dépensée de ce côté, on doit observer quelque part ailleurs une action, manifestation de cette énergie. L’étude des effets qui doivent se produire par suite de l’induction, conduisit M. Le Roux à admettre l’existence d’un courant allant du centre du disque à la circonférence ; il fallait vérifier cette conclusion. À cet effet, un support métallique vertical est en contact avec l’axe du disque ; une tige horizontale fixée à ce support est terminée par un fil de cuivre dont l’extrémité repose sur la périphérie du disque. Lorsque celui-ci tourne sans que le courant passe, on n’observe aucun effet spécial ; par suite du frottement, l’extrémité du fil s’échauffe bien un peu à la longue ; mais cette action, prévue du reste, est de peu d’importance. Si l’on vient, au contraire, à mettre la bobine en communication avec la pile, on observe, au point de contact du fil et du disque, une série continue d’étincelles très-vives, jaillissant avec intensité et dénotant l’existence d’un courant très-énergique dans le circuit formé par le disque, son axe et les diverses pièces qui y sont adaptées et que nous avons décrites.

C’est dans l’existence de ce courant prévu par la théorie que consiste l’induction péripolaire de M. Le Roux. Jusqu’à présent, on ne voit pas à cette expérience d’applications pratiques ; mais elle, est cependant fort intéressante en ce qu’elle est une confirmation des idées théoriques sur l’induction ; M. Le Roux, en présentant cet appareil à la Société française de physique, a montré que les résultats étaient d’accord particulièrement avec la loi de Lenz qui résume les actions des courants.

Cet appareil agencé par M. Ruhmkorff, l’habile constructeur d’instruments de physique, a été présenté également à la réunion des sociétés savantes à la Sorbonne. Les explications fournies par M. Le Roux ont été écoutées avec attention, et les membres de la réunion ont suivi avec intérêt les expériences qui ont été exécutées sous leurs yeux.


LES FLEUVES[1]

Les montagnes ne sont pas jetées irrégulièrement sur l’épiderme terrestre ; elles y forment, au contraire des réseaux découpés avec symétrie, des lignes tra-

  1. Ce chapitre est extrait du volume l’Eau, dont la 3e édition vient d’être mise en vente à la librairie Hachette.