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Page:La Nouvelle Revue, volume 102 (septembre-octobre 1896).djvu/366

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LA NOUVELLE REVUE.

de toute nécessité, atteindre le grand public. Tello en parla à son conseiller habituel, M. Edward-H. House, l’écrivain bien connu. L’entretien avait lieu devant un ami de M. House qui était banquier et fut prodigieusement intéressé par ce qu’il entendit ce jour-là :

— Combien, dit-il à Tello, vous faudrait-il d’argent pour agrandir le journal et lui mettre une couverture en papier de couleur ?

— Au moins 100 dollars (500 francs), répondit Tello.

— Eh bien, dit le banquier, qui signa un chèque, les voici ; si vous faites des bénéfices, vous me les rendrez à vos convenances ; sinon, ne vous en inquiétez plus.

Tello a rendu les 500 francs ; il ne les a pas pris sur ses bénéfices ; il les a regagnés à part en écrivant des articles pour quelques grands journaux qui commençaient à parler de lui à leurs lecteurs ; le sien, pendant ce temps, a prospéré ; il lui a donné un titre poétique : The Sunny Hour (l’Heure ensoleillée). On en passe une en le lisant, car chaque page dit l’immense et généreux effort du petit fondateur : son naïf appel à toutes les souveraines d’Europe, qui, presque toutes, figurent sur sa liste de patronage, sa constance et sa persévérance devant les difficultés et les déboires, son pénible apprentissage du métier d’éditeur, et, au travers de ses études scientifiques qui ne paraissent pas en avoir souffert, les soirées passées à répondre à des lettres ou à corriger des épreuves.

La plume de Tello parle une jolie langue, simple et légère, et c’est en ces termes qu’il a apprécié, une fois, ce que lui-même doit à son journal : « Vous ne sauriez croire combien cela aide à l’éducation d’un garçon, d’avoir ainsi un petit journal à conduire et combien cela lui fait toucher du doigt l’utilité pratique de ce qu’on lui enseigne. Si j’ai bien réussi avec le Sunny Hour, cela tient d’abord à ce que, travaillant pour les autres, j’y apportais plus d’ardeur et de dévouement, et ensuite à ce que je n’ai jamais perdu de vue la nécessité d’une bonne réclame pour « pousser le journal » et celle de bonnes finances pour le soutenir. Je ne dépense jamais un sou de plus qu’il n’est nécessaire et que je ne puis en dépenser. Tout garçon ou fille de mon âge aurait réussi de même par ces moyens. »

Ne trouvez-vous pas ces lignes délicieusement fraîches ? Quelle