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Page:La Nouvelle Revue, volume 102 (septembre-octobre 1896).djvu/82

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et dans la Suivante cette maxime hautaine :

Un parjure jamais ne devient légitime.

Ce sont là des fragments d’or pur, enveloppés, il est vrai, de trop d’alliage, mais qu’on ne saurait oublier. Je retrouve aussi dans certains monologues médiocres le germe de ces invocations solennelles, de ces grands mouvements dont un jour il développera l’essor tragique :

Souvenirs importuns d’une amante laissée… ;

ou bien :

Frénétiques transports ! avec quelle insolence
Portez-vous mon esprit à tant de violence ?
Allez ! vous avez pris trop d’empire sur moi !

Une de ses héroïnes s’écriera comme Émilie :

Tout beau ! ma passion !

Un personnage de la Galerie du palais le prendra sur le même ton :

Indiscrète vengeance !
Et, comme de mon cœur, triomphe de ma haine !

Voici une apostrophe, un peu déplacée, dans la Suivante, mais qui était dans la manière de Pompée et de Rodogune :

J’atteste ici le bras qui lance le tonnerre
Que tout ce que le ciel a fait paraître en terre
De mérites, de biens, de grandeurs et d’appas,
En même objet uni ne m’ébranlerait pas !

Et cette autre encore :

Grands dieux, qui m’enviez cette juste allégeance
Qu’un amant supplanté tire de sa vengeance,
Et me cachez le bras dont je reçois les coups,
Est-ce votre dessein que je m’adresse à vous ?

Le dialogue est souvent nourri de ces traits de vigueur, avec une moins superbe rhétorique :

Ce n’est pas avec moi que tu te dois jouer,
Et ton crime redouble à le désavouer.

Ici, le poète presse l’action par cette interpellation rapide :

Avec de tels discours oses-tu m’aborder,
Perfide, et sans rougir peux-tu me regarder ?