Page:La Nouvelle revue. v.103 (Nov-Dec 1896).djvu/571

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« Il faut leur ramener Maxime, me dis-je. Il m’aime. J’userai de mon influence pour le réconcilier avec ses parents. »

Depuis la scène mystérieuse entre le père et le fils, je n’avais point revu Maxime. Nous partîmes pour les Yvelines dans les premiers jours de juin. Mon tuteur passant à Paris toutes ses journées, Mme Gannerault conçut le projet de faire venir son fils et de le sermonner en cachette. J’approuvai cette idée qu’elle mit à exécution presque aussitôt.

J’avais écrit à Maxime. Il répondit sans commentaires que nous pouvions compter sur lui. Le train de onze heures l’amena au jour fixé et quand il sauta sur le quai de la gare, en vêtements clairs d’été, l’œillet blanc à la boutonnière, presque tendre et presque gai, la pauvre Mme Gannerault fondit en larmes. Il la prit par la taille et l’embrassa d’un air câlin :

— Voyons, maman !… Allons, maman !

— Ah ! mon grand garçon ! Tu m’aimes donc encore ?

— En doutes-tu ?

Il l’emmena dans le chemin et, avec des sourires d’amoureux, il lui fit compliment de sa robe, de sa fraîcheur, de sa jeunesse persistante. Ravie, elle ne savait comment ébaucher une remontrance, risquer une timide interrogation. Je les suivais à quelques pas, tout heureuse de trouver Maxime si différent du rude et sarcastique Maxime que j’avais vainement taché d’aimer.

Au déjeuner, il fut charmant. J’espérai qu’un secret remords avait aidé mes prières. Et pour la première fois depuis la soirée de Roméo, j’éprouvai, en regardant Maxime, un sentiment de pure tendresse. Je lui savais gré d’être meilleur qu’il ne le voulait paraître. Il devina cette disposition affectueuse et comme sa mère disparaissait un instant pour appeler la bonne, il me tendit la main par-dessus la table. Je serrai cette main en souriant. Mais comme j’ouvrais les lèvres pour questionner l’enfant prodigue, notre voisin le notaire tomba parmi nous, venant, disait-il, prendre le café sans façon. Maxime donna bientôt de tels signes d’impatience que ma marraine désolée me prit à part.

— Écoute, chérie, je ne puis congédier ce gêneur. Maxime s’ennuie. Je le sens et je le déplore, car il était très gentil ce matin. Sortez, promenez-vous ensemble. Je vous rejoindrai vers trois heures dans la sablonnière et tu me laisseras seule avec mon fils.

Une ardente rougeur me monta aux joues. Quoi ! Mme Gannerault elle-même nous facilitait le tête-à-tête désiré ! Maxime