Page:La Retraite de Laguna (Plon 1891).djvu/150

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la vie de guerre est pleine des contrastes les plus inattendus.

La fraîcheur extrême des nuits d’hiver, dans l’Amérique du Sud, même entre les tropiques, nous obligea bientôt à regagner nos gîtes improvisés, où le besoin du sommeil reprit tous ses droits pendant les heures qui s’écoulèrent encore jusqu’au lever du soleil.

Aux premières lueurs du jour, nous nous remîmes en marche, exposés au feu des pièces de l’ennemi, mais ne nous arrêtant pas pour leur répondre : nos tirailleurs poussaient vivement ce qu’ils trouvaient devant eux, et ne perdaient pas leurs coups. Quelques cavaliers ennemis étaient tombés dès le commencement de la fusillade, et leurs corps restaient étendus, abandonnés sur la route, leurs compagnons n’ayant pas eu le temps de les relever et de les entraîner à la course. L’un de ces cadavres ayant été reconnu pour celui d’un transfuge brésilien qui s’était évadé de Nioac longtemps avant la guerre, les restes de ce misérable ne purent être soustraits, malgré tous les efforts des officiers, à la fureur des soldats, qui, les uns après les autres, à mesure qu’ils passaient,