Page:La Retraite de Laguna (Plon 1891).djvu/190

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Cet immense danger de notre position inspira au commandant la résolution immédiate de diminuer encore le bagage, pour renforcer les attelages des caissons et des pièces. Il s’en expliqua avec les officiers que cette mesure regardait seuls, et qui se rendirent sans observations. Se réduisant à ce qu’ils avaient sur le corps, ils mirent le feu à quelques pauvres et dernières superfluités, quelques malles, quelques baraques. Depuis le combat du 8, les soldats n’avaient rien à porter non plus qu’à perdre : ils avaient jeté jusqu’à leurs capotes, qui les gênaient dans la poursuite de l’ennemi. Les mulets, libres de leurs charges, furent destinés au transport des cartouches.

Nous nous trouvâmes ce soir-là, pour surcroît d’infortune, sous le coup d’une pluie torrentielle, d’un véritable déluge qui nous étonna, bien que nous en eussions déjà subi un terrible, et qu’il nous en eût été annoncé d’autres dès le matin par une accumulation d’immenses nuages bronzés, constamment sillonnés par la foudre, au milieu des roulements continuels du tonnerre. Les soldats se tinrent pendant toute la nuit debout, appuyés sur leurs fusils qu’ils avaient