Page:La Revue blanche, t1, 1891.djvu/189

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tion, qui depuis les temps légendaires, sert de début aux interviews de mortels et de fées.

« Faites un souhait, ô faibles hommes, et par ma toute puissance, il sera réalisé ».

Mais les faibles hommes ne répondirent point, étant trop abasourdis encore et, complaisamment, la bienfaisante Adonide jugea bon de leur venir en aide.

« Peut-être, dit-elle, souhaitez-vous une femme qui vous aime ? »

Bubu bégaya : « Une femme qui nous aime… »

« Peuh ! » interrompit la Toque, qui commençait à reprendre ses esprits, « par le temps qui court, ça rapporte si peu. »

Sa voix s’était raffermie, et tranquillement, il formula son désir : « Nous voulons, dit-il, être riches. »

Suivant leur sacramentelle expression, les courriers mondains qualifièrent d’ « éblouissante », la garden party qui fut, pour le comte Gaspard, l’occasion de présenter à ses amis, ses deux neveux « de retour », disait-il, « d’un lointain voyage en yacht dans les mers polynésiennes. » Bubu, baptisé Freddy, et la Toque, dénommé Romuald, réussirent à plaire dès l’abord. Un subtil et disert théoricien du dandysme leur trouva cet air de distinction et de race qui ne s’acquiert pas et ne trompe jamais.

Dans les jours qui suivirent, Freddy et Romuald se souvinrent à propos qu’ils avaient jadis fait la cote sur maint champ de courses suburbain. Ils montrèrent, dans les questions du turf, une compétence réelle, non pédante, et qui fut fort appréciée. Des jeux athlétiques internationaux furent l’occasion de leur succès définitif. Romuald-la Toque battit sur les haies les meilleurs champions du Manhattan Athletic Club, de New-York, et Freddy-Bubu fit preuve d’une force musculaire remarquable, au lancer du marteau.

Sur les choses littéraires, ils gardèrent un silence mo-