Page:La Revue blanche, t12, 1897.djvu/282

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de légiférer que d’organiser la défense et de prendre des mesures d’audace, entravant l’action des vigoureux. Manque de cohésion par suite d’absence d’une direction nécessaire dans une bataille où Paris seul luttait contre la France et le reste.

Organisation militaire : mauvaise, quoiqu’il y eût tout ce qu’il fallait pour vaincre en quelques jours. Trop de lenteur, trop d’hésitation, optimisme déplorable, montrant des batailles gagnées là où il y avait recul ; pas d’unité.

Organisation financière : admirable, si l’on avait usé de la puissance financière contenue dans ce seul établissement, la Banque, on aurait sauvé peut-être la situation militaire. On touchait à l’âme bourgeoise.

Organisation administrative. Excellente, c’est de l’aveu de tous.

III. L’influence : énorme. Le prolétariat surgissant en juin 1848 écrasé, avait cédé devant la calomnie. Juin semblait un combat, contre les parlementaires de l’Assemblée nationale réactionnaire, mais avec ce discrédit qu’il semblait en même temps que ce fût contre la République.

La Commune a remis Juin en lumière. La Commune, sorte de jacquerie, d’abord patriotique, préparée par les événements du siège et favorisée par la lâcheté de la Défense nationale, est devenue le gouvernement populaire insurgé contre l’autre gouvernement. Elle a été un acte audacieux d’internationalisme en face de l’invasion qu’elle aurait pourtant combattue, si elle avait été victorieuse de Versailles. Elle a posé le problème social en face des peuples, problème jusque là enfermé dans des livres peu lus ou oubliés. Elle a été une leçon pour l’avenir. L’imprévu qu’elle était peut toujours se renouveler. Nul, six mois plus tôt n’aurait été cru s’il l’avait prédite. Elle a montré ce qu’on pouvait, et aussi, que les oligarchies ne sauraient résister à un assaut, violent, rapide, persévérant, des démocraties conscientes et bien inspirées par des minorités dévouées jusqu’au dernier sacrifice.

Un point noir. Les fusillades atroces ont certainement diminué l’énergie parisienne. On frappait tout ce qui avait une physionomie ouverte, courageuse ; les audacieux, d’autre, part, qui ont pu échapper au mur et aux soldats-juges, se sont réfugiés à l’étranger : ils ont étendu la sphère d’influence du socialisme, mais le point d’action nécessaire a été déserté. Et il faut de longs jours pour le reconstituer. Il faut avoir connu quelques uns de ceux qui sont morts, pour juger de la perte faite : Flourens, Duval, Ferré, Rigault, etc…, pour ne parler que de ceux qu’on connaît. Cela reviendra et revient, mais cela a bien tardé.