en reprend des forces, et recouvre l’avantage. Tôt ou tard il faudra s’arrêter… La faillite.
Qu’elle vienne donc, puisqu’après on pourra se reposer ! Plus on va, moins se partageront les créanciers. Alors, pourquoi lutter ? — L’honneur de la maison !
L’honneur de jeter ses gens un jour, sur le pavé, de faillir à toutes promesses, l’honneur d’une vie de misères, de toute une guerre atroce… — l’honneur de la maison…
La grand’route de la vie… Par là, tout droit, toujours…
— Non pas. Je sais où cela mène. Tôt ou tard, de gré ou de force, il faudra s’arrêter, prendre ailleurs.
— D’ici là…
— Non. Tout de suite. La vie déjà est à son faîte. L’ombre que fait la pensée sur la vie qui chemine n’est plus devant, espoir ! mais derrière, souvenir. Tout de suite, si je veux vivre de la vie où j’atteindrai. Vivre ! Pas même, la voir seulement. Mais tout de suite.
Hâte ! Hâte ! double les pas. Oh ! que c’est lourd, une femme et un enfant, quand on marche vers un rêve. Vite ! Déjà un grand chemin est fait. Qu’elle est loin de toi, la vie tranquille des autres hommes ! Hâte-toi ! car déjà tu ne pourrais revenir au port que tu quittas. À jamais s’est fermé le cercle. Il n’y a plus rien. La ligne horizontale, nette et dure de la mer, est semblable, par derrière où les dernières choses fermes viennent de s’engloutir, et par devant, où rien n’émerge, rien, — rien encore.
Rêves, soifs de révolte de la jeunesse ! Quel détour prend la vie pour ramener à vous… Vous étiez donc le bon chemin, le droit chemin…
— Révolution sociale ! Encore une ! Éternelle défaite et vieille plaisanterie. Le monde qui va changer pour te faire plaisir…
Déclassé, cesse de rire. Peut-être vas-tu plus tôt changer le monde, que ton sort. Peut-être est-ce là le plus court : régénérer le monde, pour gagner les quelques sous qu’il faut pour vivre.
— Mais c’est le bonheur pour d’autres, pour quand tu n’y seras plus.
— J’y serai. Déjà le meilleur de ma vie s’est en allé. J’ai un enfant qui verra…
Écoute, n’appelle-t-il pas ! Je crois que le petit a faim.
Dépêche ! Atteins le monde qui donnera à manger à tous les petits enfants. Le monde futur… Mais vite, vite… Dis, en attendant, n’y a-t-il pas un petit grignotage, quelque chose, de quoi tromper la faim, d’ici le monde futur ?
Il appelle… Il appelle… Lui ne peut pas attendre. Ah ! plus que jamais il faut réaliser tout de suite. Déjà bien tard, car c’est avant