Page:La Revue blanche, t18, 1899.djvu/133

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tâche de justifier l’annexion de l’Alsace et de la Lorraine. C’est, en réalité, l’idée allemande de la patrie — telle que Fichte, par exemple, l’a définie à l’époque d’Iéna — qu’ils défendent contre les doctrines internationalistes.

C’est qu’il est difficile de considérer comme deux termes contradictoires l’internationalisme et l’idée française de la patrie. La patrie française a été jusqu’ici, selon le mot de M. Lavisse, la « plus humaine des patries ». Ce n’est pas elle qui, en se posant, s’oppose aux autres. L’« esprit de solidarité à travers le temps » n’exclut pas la solidarité réelle qui doit, à travers l’espace, unir les hommes de toutes les générations humaines.

Mais peut-être est-ce faire trop d’honneur à la nouvelle Ligue que de discuter ses doctrines. Voici que M. Giard se déclare internationaliste et appelle l’armée « une monstrueuse survivance des âges de barbarie ». Or, M. Giard est membre de la Ligue parce qu’il pense que « le seul moyen d’apaisement est de laisser le condamné là où il est ». Cette sereine et généreuse formule du professeur de la Ville de Paris, qui fut député socialiste, fera peut-être réfléchir ceux qui ont cru que la Ligue avait souci de l’éducation de la France.