Page:La Revue blanche, t20, 1899.djvu/358

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« Monsieur le Procureur,

« Puisque la libre circulation dans les rues de La Marche et les endroits publics n’est plus assurée aux honnêtes gens, j’ai l’honneur de vous faire connaître qu’à partir de ce jour je sortirai armé.

« Veuillez, etc.

« À bon entendeur, salut ! »

De la Localité :

MAITRESSE CORRECTION

Depuis le triomphe (??) de leur candidat, les laquais de Martin-Martin se croient tout permis.

Hier, entre cinq et six, notre rédacteur en chef, M. Robinet, prenait tranquillement son absinthe au Café Fougère, quand son attention fut tout à coup appelée sur un groupe d’individus au milieu desquels pérorait l’exécuteur des basses-œuvres, le vidangeur de la Préfecture, Antonin Canelle.

Le jugeant aisément pris de boisson selon son habitude, M. Robinet se désintéressait des propos de ce triste pochard ; mais des éclats de voix le forcèrent à dresser l’oreille : Canelle, agitant les journaux, le fixait d’un air goguenard et provocant, et commentait en termes odieux l’admirable et retentissant article que M. Quesnay de Beaurepaire venait de publier dans l’Écho de Paris : le Testament d’un Franc-Tireur.

M. Robinet qui, comme on sait, est officier de réserve, ne put tolérer plus longtemps un pareil langage, et s’approchant seul au milieu du groupe, très calme, il se planta bien en face d’Antonin Canelle, et lui administra une magistrale paire de gifles.

— Gardez tout ! — a-t-il ajouté spirituellement ; et il s’est retiré au milieu des rires de toute l’assistance, visiblement amusée et ravie par l’attitude couarde et la mine penaude du bel Antonin.

Il va sans dire qu’à l’heure présente, notre sympathique rédacteur en chef attend encore les témoins du giflé Canelle.

P. c. c.
Franc-Nohain