Page:La Revue blanche, t22, 1900.djvu/443

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
la disciplote
437

On ne veut pas qu’il soit dit que la procédure des conseils de discipline soit celle d’un tribunal ; on ne veut pas que les compagnies de discipline soient des bagnes ; on ne veut pas que les disciplinaires soient des forçats : et, en réalité, le conseil de discipline est un tribunal omnipotent, le disciplinaire est aussi mal traité que le forçat.

Un camp de disciplinaires ne diffère pas des camps de soldats de l’armée régulière. Une légère palissade ou une petite muraille l’entoure, mais, la plupart du temps, il n’est ceint d’aucune clôture. Les portes des chambres sont ouvertes, les disciplinaires peuvent aller jusqu’aux limites extrêmes du camp ; ils peuvent même les franchir : personne ne les contraindra à y rester, nul obstacle, — la garde ne s’occupe pas d’eux. Les disciplinaires n’ont pas l’apparence des prisonniers. Ils sont retenus au camp par l’espérance de la libération définitive autant que les forçats par le boulet qu’ils traînent.

Ce semblant de liberté est laissé à des hommes jeunes, dans la pleine possession de leur force physique : à des individus qui sortent des pénitenciers ou des travaux publics ; qui, depuis des années, trois, cinq, dix, quinze ans, n’ont jamais été libres. Les plaines, les montagnes sont devant eux pour les tenter ; mais, s’ils franchissent cette limite du camp, c’est trente, soixante jours de prison, c’est la cellule, ce sont les fers, ce sont les pionniers, ce sont les cocos !

En sus de la consigne perpétuelle, les punitions réglementaires infligées aux compagnies de discipline sont :

La salle de police.

La prison simple.

La prison aggravée.

La cellule simple.

La cellule de correction.

Le cachot.

Les fers.


SALLE DE POLICE

Par suite de l’état permanent de consigne, la première punition est la salle de police ; lorsque les compagnies étaient en France, la salle de police était relativement confortable ; l’établissement des compagnies en Afrique a fait diminuer le bien-être[1].

Mais le caractéristique de la salle police à la discipline est la privation de café un jour sur deux. Cet usage fut établi en 1845[2] et il existe toujours[3].

  1. À la première compagnie, qui est baraquée et offre de l’analogie avec les anciens établissements disciplinaires, les punis de salle de police ont droit à leur couvre-pied et une paillasse pour deux en hiver ; en été, la paillasse est remplacée par une couverture pour six ou sept. Le lit de camp est en ciment.
  2. Circulaire n° 415. 26 septembre 1845.
  3. La soupe du soir ayant lieu à cinq heures, l’homme puni privé de café ne mange le lendemain qu’à dix heures du matin, c’est-à-dire reste dix-sept heures sans prendre de nourriture, quoi qu’allant au travail comme les autres.