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LES CORPS DISCIPLINAIRES


La « Disciplote »


PRÉLIMINAIRES

Il y a quelques années seulement que l’on commence à s’émouvoir de ce qui se passe dans ce vaste et terrible système de répression que les soldats ont dénommé : Biribi. Des révélations, par la voie du livre et de la presse, ont commencé à initier le public à ce que cache ce nom étrange et de sinistre renommée. Ce mouvement naissant, rencontrant un auxiliaire dans celui qui soulève contre les conseils de guerre une partie de la nation, va motiver une intervention parlementaire.

À la suite de la discussion sur la réforme du Code pénal militaire et sur la jurisprudence des conseils de guerre, viendra à la Chambre l’examen d’un projet de décret, déposé par M. Pierre Richard et tendant à la réforme du régime des compagnies de discipline. Quoiqu’il ne soit pas permis de préjuger de son efficacité, celle intervention parlementaire est certainement un indice remarquable, mais les parlementaires qui vont discuter sur les réformes à apporter dans le régime des compagnies de discipline connaissent-ils, même superficiellement, les effets du régime actuel et les causes de ces effets ? Non. Et dans la masse de la nation, seule une infime minorité (en dehors de ceux qui en ont fait personnellement l’expérience) sait ce qui se cache sous ce nom de Biribi.

Nous allons, par le récit de faits indéniables, donner une idée des institutions pénitentiaires de l’armée française.


CONSIGNE PERPÉTUELLE

Dans le début, les disciplinaires étaient traités sur le même pied que les autres troupes, ils pouvaient aller en ville[1].

Nul acte administratif public ne fait savoir quand cette faculté leur a été retirée.

Actuellement, les disciplinaires sont considérés comme étant en état permanent de punition[2].

Cet état de punition se signifie par la consigne perpétuelle.

Il est défendu aux disciplinaires de franchir les limites de leur camp sans être accompagnés de gradés ; ils ne jouissent ni de congés, ni de permissions. Cette consigne est assurée au moyen d’appels nombreux durant le jour et de contre-appels de nuit[3].

  1. Circulaire ministérielle de 1818.
  2. Décret du 5 juillet 1890, art. 14.
  3. À la 1re  discipline on ne comptait pas moins de onze appels de jour sans compter ceux faits à l’issue de toutes les corvées extérieures et les contre appels de nuit ayant lieu toutes les heures.