Page:La Revue blanche, t25, 1901.djvu/428

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En 1862 dans le sud du Yorkshire les chefs d’exploitation du district se coalisent et ferment les houillères et trois mille ouvriers.

En 1863 les maîtres de forges de Staffordshire s’entendent avec ceux du centre et du nord de l’Angleterre et laissent éteindre tous les fours à puddler. Les ouvriers perdirent 8 millions de salaires. Il s’agissait d’une réduction de salaires que les puddleurs avaient refusée.

En 1864, sept à huit mille ouvriers mineurs employés dans cinq houillères voisines de Chesterfield dans le Derbyshire se réunissent pour délibérer sur la formation d’une association ouvrière. Aussitôt le directeur d’une de ces houillères, Markham, signifie à ses trois mille ouvriers que tous ceux d’entre eux qui prendront part à ce projet seront congédiés, La plupart le quittent ; peu à peu d’autres cessent aussi de travailler. Néanmoins M. Markham ne se tient pas pour battu.

Opposant les meetings aux meetings, les discours aux discours, il parvient à organiser parmi les ouvriers un parti opposant qui se recrute d’autant plus facilement parmi les moins résolus que la grève s’étendant à tout le district, ceux qui y ont pris part ne reçoivent aucun secours et sont réduits à la dernière misère. L’occasion s’offre de porter un coup décisif. Les adversaires de l’association (ouvrière), reçoivent en présent de M. Markham de la viande et de la bière. Ils organisent un repas et y convient les ouvriers du voisinage qui restaient fidèles à l’association.

Ceux-ci au nombre de trois à quatre cents s’empressent de venir prendre leur part du banquet et retournent au travail le lendemain matin [1].

M. Markham reprit l’exploitation avec 1 500 ouvriers seulement.

III

On se figure, sans doute, que les faits relevés plus haut, et dont on ne peut méconnaître la gravité, ne sont que des exceptions regrettables.

Rien n’est plus faux. Jamais les grèves patronales n’ont été aussi fréquentes, aussi nombreuses, aussi violentes, aussi générales. On peut même affirmer que la plupart des grandes grèves qui ont éclaté en France, en Angleterre et en Amérique dans ces dernières années, ont été des grèves suscitées par les employeurs, en tout cas, des grèves presque toujours favorables aux capitalistes.

En effet l’ère des industries monopolisées (pools, cartells, trusts, syndicats, etc.), a marqué le commencement des coupes sombres, depuis une vingtaine d’années.

De 1881 à 1886, les ouvriers du bâtiment aux États-Unis furent affectés par 1 900 lock-outs ; les carriers et les tailleurs de pierre par 489.

De 1880 à 1890, six cent quatre-vingt-un fourneaux ont été fermés. De même dans l’industrie de la métallurgie, du papier, de l’ameublement, de la carrosserie, des machines, etc., toutes ces entreprises fusionnant, chacune dans sa catégorie, il en résultait une limitation de la production, c’est-à-dire une mise à pied des travailleurs.

  1. Les Associations ouvrières en Angleterre, par le comte Paris. Voir aussi L. Smith, loc. cit.