Page:La Revue blanche, t26, 1901.djvu/257

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par an des cultivateurs viennent emporter tous ces détritus… De quoi vivent-ils ? C’est une question qu’on se pose toujours en étudiant ces communautés orientales, et la réponse n’est par facile à trouver. En considérant le petit nombre de ceux qui ont un métier, une profession avouée, on se demande ce que font les autres pour ne pas mourir de faim. Plusieurs sont orfèvres ; d’autres courtiers ; quelques-uns vendent des comestibles ; beaucoup font la vente et l’achat de vieux habits ; quatre ou cinq sont marchands d’antiquités. Et les autres ?…

Le correspondant de l’école de Téhéran fait remarquer que l’esprit de famille est grandement en péril. Si l’on n’y prend garde, écrit-il, la bigamie et le divorce finiront par détruire complètement l’esprit de famille, l’union, etc. Le contraire nous étonnerait. Comment la famille pourrait-elle résister à tant de détresse et d’incertitude ? Cela arrive chez les hommes de toutes religions et de toutes races. Comme dans tous les ménages affligés de privations, de tracas et de tristesse, il règne entre les époux une mésintelligence perpétuelle. D’autre part, la venue des enfants, au lieu d’être une source de joie devient une cause nouvelle d’ennuis et de désagréments. En Perse, dès que la jeune fille est nubile, les Israélites, comme les autres, la marient au premier venu. Et il est très fréquent de voir des enfants mariées et déjà mères [1].

AU MAROC

Dans l’intérieur, tous les non-musulmans et principalement les Israélites ont à essuyer les sévices du reste de la population.

Voici quelques renseignements extraits du rapport de M. Ribbi, directeur de l’école de Tanger, sur la population israélite de Marrakesch :

« Les maisons du mellah (quartier juif) sont au nombre de quelque 600 ; sur ce nombre une centaine environ sont habitées chacune par une seule famille, composée d’une dizaine de personnes en moyenne ; les autres renferment 8 ou 10 familles, soit une soixantaine de personnes par maison. Si nous prenons pour base d’appréciation le coefficient de 25 âmes par maison, nous arrivons à un effectif total de 14 à 15 000 âmes ; c’est en effet, le chiffre approximatif de la population juive qui vit dans le mellah de Marrakesch. L’activité qui règne au mellah est intense : tout le monde travaille, les ouvriers dans leurs ateliers, les petits colporteurs et les hommes de peine dans les rues. Et cependant on voit un grand nombre de vieillards, d’infirmer, d’enfants mendier ; la misère est fort grande… On ne saurait imaginer la pauvreté, la saleté des talmudoras ; ce sont de véritables granges où les averses tombent comme en pleine rue, défonçant le sol, qui n’est ni dallé ni pavé.

  1. Depuis trois ans l’Alliance a fondé des écoles dans les pprincipales communautés de la Perse. Notamment à Téhéran, Hamadan, Ispahan.

    « J’ai eu l’occasion, dit un correspondant de l’Alliance de voir les misères de nos coreligionnaires de Turquie, de Palestine, du Maroc, rien n’approche du misérable état où se trouvaient ces pauvres enfants avant mon arrivée. »