Page:La Revue blanche, t28, 1902.djvu/293

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

agacée du repos, et donnant quand même un peu de ses gestes aux meubles de la maison. Elle ne put absolument rien dire, battit largement des paupières du côté du Vieux. Son poing, sous son menton, poussait sa tête en arrière, la comprimait un peu et semblait exprimer des regards du fond de ses yeux comme si toute son âme lui remontait à la face.

Le lendemain matin, on le fit venir. Il était rouge de plein air et de bonne nourriture, sa science de médecin lui donnait des mouvements brusques et se montrait dès l’entrée, décisive et angoissante un peu. On déroula les linges qui entouraient la jambe, on eût dit que la peau était moins enflammée que d’ordinaire. Il se pencha, regarda par en dessous, appuya son doigt à plusieurs places, après quoi il demanda de l’eau pour se laver les mains. Il dit :

— Je vais vous écrire une ordonnance. Que voulez-vous, mon pauvre père Perdrix ? Les maladies des riches ont leurs privautés. On pourrait bien vous guérir, mais ça serait long et surtout ça vous coûterait cher. Ceci empêchera le mal de gagner du chemin. Pour le reste, il ne vous fera pas mourir. Croyez-moi, à votre âge, votre jambe durera autant que vous.

On lui donna quarante sous, puis il partit tout simplement, parce qu’il y a d’autres malades dans les villes.

(À suivre.)Charles-Louis Philippe