Page:La Revue blanche, t28, 1902.djvu/617

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Nicotisme. — C’est partiellement par les poussières dégagées pendant la manipulation du tabac que l’intoxication ni coti nique se produit chez les ouvrières des manufactures.

Les manufactures de tabac en France occupaient en 1898 16 660 ouvriers (dont 1 150 hommes et 15 100 femmes).

Dans une communication à la Société de médecine publique, M. le docteur Delaumay a communiqué les résultats de l’enquête qu’il avait faite chez plusieurs sages-femmes du quartier du Gros-Caillou, qui assistaient beaucoup d’ouvrières de la manufacture de tabac de la rue Jean-Nicot. D’après la première, « le tabac à la réputation de provoquer des fausses couches persistantes ». Cette opinion est tellement accréditée dans la manufacture, que quelques ouvrières qui peuvent suspendre leur travail, cessent daller à l’atelier dès qu’elles deviennent enceintes. La sage-femme en question a soigné trois femmes qui faisaient des fausses couches quand elles étaient à la manufacture et qui n’en font plus depuis qu’elles l’ont quittée. L’une de ces femmes, qui avait déjà fait deux fausses couches, alors qu’elle était à la manufacture, étant devenue enceinte pour la troisième fois, a cessé de fréquenter l’atelier au cinquième mois de sa grossesse ; l’enfant est venu à terme, mais est mort peu de temps après sa naissance.

La même femme ayant changé de profession a eu depuis un quatrième enfant qui est très bien portant. (Revue d’hygiène 1880, p. 217).

Les deux autres sages-femmes ont insisté sur ce que les ouvrières avaient des grossesses difficiles.

De son côté, M. le docteur Gaston Decaisne a indiqué qu’en recherchant la cause des fausses couches, soignées au service d’accouchement de la Charité, il avait bien des fois constaté qu’il s’agissait d’ouvrières de la manufacture des tabacs du Gros-Caillou. (Revue d’hygiène 1880, p. 228).

Quant aux ouvrières des manufactures de tabac, dit M. Goyard, on ne saurait méconnaître que la plupart sont plus ou moins influencées pendant leurs grossesses par les émanations toxiques qu’elles respirent. Il y en à qui ne parviennent jamais à mettre au monde un enfant vivant. » (Revue d’hygiène, 1880. p. 225).

M. Quinquand, médecin des hôpitaux, a constaté que les ouvrières de la manufacture de tabac de la rue Jean-Nicot étaient sujettes aux fausses couches. Il a cité l’observation d’une femme qui a fait trois faussas couches pendant son séjour à la manufacture et qui, depuis qu’elle est sortie de cet établissement, a eu trois enfants tous bien portants. (Revue d’hygiène 1880, p. 900).

Dans un mémoire lu au Congrès d’hygiène de Turin, M. le docteur Jacquemart, de Paris, dit avoir trouvé une moyenne de 45 avortements sur 100 grossesses relevées chez des ouvrières du tabac. (Revue d’hygiène 1880, p. 36).

La disposition aux avortements ne serait pas le seul méfait de la nicotine et son action pernicieuse frapperait les nouveaux-nés des cigarières de débilité congénitale. Dans son travail déjà ancien (1868),