Page:La Revue blanche, t30, 1903.djvu/573

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et dont on comprendra le résultat une fois qu’elles seront exécutées.

Telles ne sont pas, malheureusement, les très nombreuses expériences que publient depuis quelques années les recueils biologiques.

Que, dans un but exclusivement pratique, un horticulteur ou un éleveur fasse varier empiriquement telle ou telle des conditions dans lesquelles se développe une plante ou un animal et obtienne ainsi, par hasard, et après beaucoup de tâtonnements, un résultat avantageux, c’est là évidemment une chose utile ; personne ne peut le nier. Et si cette recherche empirique a été faite avec assez de soin, si toutes ses circonstances ont été consciencieusement notées, il sera quelquefois possible d’obtenir de nouveau un résultat semblable en appliquant une seconde fois le même procédé à des individus analogues. Ce serait même toujours possible si l’expérience avait été réellement une expérience scientifique dans des conditions entièrement définies, mais quand il s’agit d’êtres vivants un peu élevés en organisation, les conditions sont trop complexes pour qu’on puisse espérer les avoir toutes connues. De là l’incertitude qui subsiste toujours dans l’application des meilleurs procédés empiriques.

Quoi qu’il en soit de l’utilité incontestable de ces recherches au point de vue pratique, leur portée scientifique peut se discuter ; non pas qu’il ne soit commode d’avoir sous les yeux, par l’application de procédés empiriques, de nombreuses variations d’un même type vivant, mais c’est là seulement une commodité pour l’étude ; réduites à ces genres d’expériences, les sciences naturelles resteraient des sciences d’observation et ne seraient pas élevées à la dignité de sciences expérimentales.

Dans la variété infinie des conditions réalisées à chaque instant en chaque point de la surface de la terre, variété telle que deux êtres vivants ne sauraient être identiques, il s’effectue sans cesse, en tout lieu, des expériences analogues à celles que réalisent les éleveurs, et il n’y a aucune raison, au point de vue purement scientifique, pour que la fantaisie des horticulteurs ait produit, par hasard, des variations plus intéressantes que les variations naturelles. La sagacité des observateurs peut tirer aussi bien des unes que des autres des conclusions biologiques plus ou moins importantes ; l’expérimentation empirique n’a fait qu’élargir de quelques coudées le champ infiniment vaste de l’observation.

Aujourd’hui, le nombre des observations enregistrées en sciences naturelles est immense : pendant que tant de chercheurs