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QUESTIONS D’HISTOIRE

III. — Questions d’Histoire.

LES ORIGINES DU POUVOIR TEMPOREL DE LA PAPAUTÉ.

Le geste du nouveau pontife, donnant sa première bénédiction apostolique Urbi et orbi de la loggia de Saint-Pierre et renouant ainsi une longue tradition interrompue depuis la prise de Rome par les troupes du roi Victor-Emmanuel, évoquait, il y a quelques mois à peine, le souvenir du temps où le chef de l’Église catholique était aussi le maître de la Ville Éternelle et le souverain d’un État qui, durant plus d’un millier d’années, avait fait de lui une des principales puissances de la péninsule italienne.

Que cette reprise de contact du pape avec le monde extérieur signifie tout ce qu’on a voulu y voir, nous laissons à d’autres le soin d’en décider ; mais il ne semble pas que ceux qui ont disserté, à ce propos, sur le pouvoir temporel de Pie IX et de ses prédécesseurs, en aient toujours parlé très congrûment. Il n’est rien de tel, pour en donner une idée juste, que de remonter jusqu’à la période des origines. C’est une histoire qui a été bien des fois contée, mais qui, embrouillée comme à plaisir par certains érudits, n’a peut-être pas encore été présentée tout à fait sous son vrai jour[1].

Si nous n’avons plus l’acte de naissance de l’État pontifical, nous savons du moins quand et dans quelles circonstances il est venu au monde.

On était au milieu du VIIIe siècle. L’Italie se trouvait alors dans une situation confuse. Théoriquement, elle faisait partie de « l’Empire romain », qui, depuis la disparition du dernier empereur de Ravenne en 476, relevait tout entier du souverain de la « Nouvelle Rome », bâtie par Constantin sur les rives du Bosphore ; mais, dans la pratique, et malgré les succès éphémères remportés au VIe siècle par les armées de Justinien, elle échappait plus qu’aux trois quarts à l’autorité du gouvernement impérial, trop

  1. Nous ne pouvons toutefois oublier le fin et brillant récit de Mgr Duchesne Les premiers temps de l’État pontifical (2e éd., Paris, 1904, un vol. in-12). Le nôtre est fondé sur une étude nouvelle et directe des documents.