Page:La Revue des Lettres, 1925.djvu/146

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.


LETTRES INTIMES

de Renée Dunan
II

To sir Dolatam Vaydia,
Ganderoi (near Bombay)
India.
Cher Monsieur,

Je serais certes charmée de pouvoir en quelques mots, comme vous le désirez, vous informer des plus récentes modifications de la langue française.

Vous me dites avoir trouvé dans Balzac les mots les plus modernes de ce temps, ou qui semblent tels. Vous en concluez donc que, malgré l’apparence, notre langue depuis cent ans s’est tout juste enrichie de quelques vocables et de quelques interversions de sens en des mots anciens. C’est une erreur.

Les femmes de Balzac, déjà, nommaient leur chapeau un « bibi ». C’est entendu. Vous avez, entendant ce mot, lors de votre dernier voyage à Paris, demandé à un professeur d’où il provenait. Il vous a dit que c’était une expression d’argot toute récente. Il s’est trompé, vous le constatez vous-même. Mais il me faut précisément vous dire que l’argot et les langues techniques des métiers sont beaucoup plus immobiles que la langue écrite. Cela semble paradoxal. C’est un fait pourtant.

L’écriture seule entraîne un renouvellement cons-