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LA REVUE DES LETTRES


LETTRES INTIMES

de Renée Dunan
[III]

Mr. G.-H. Warrenly,
624, Agass str.,
Philadelphie, U. S. A.
Mon cher Monsieur,

Vous voulez bien me demander mon avis sur cette vente de livres signés que fait en ce moment un écrivain Français notoire. Je crains en effet qu’en dehors de mon pays, le sens exact et la morale de cette histoire ne soient pas facilement saisissables.

Il me faut dire toutefois au préalable comment s’organisent ici les rapports entre les gens de lettres et les amateurs. D’abord, ainsi que vous le savez déjà, la littérature, à Paris, constitue un milieu très spécial, différencié, et foncièrement retardataire en tout ce qui concerne l’évolution intellectuelle du monde contemporain. Vous n’avez pas été, par exemple, sans constater que les imprimés seuls, en France, échappent au système métrique, et qu’on compte la mesure des lignes, comme le corps des caractères d’imprimerie, selon des us datant de la Renaissance. C’est symbolique. Voici donc comment l’écrivain, ayant publié un ouvrage, opère devant ses confrères : Il prend chez l’éditeur un certain nombre d’exemplaires, dits de service, et les revêt de dédicaces variées, pour deux catégories de personnes : 1o ses amis ; 2o les critiques de la