Aller au contenu

Page:La Rhétorique des putains, 1880.djvu/119

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 95 —

MARTHE

Sans doute, mademoiselle. Qui peut, par exemple, penser à l’industrie la plus charmante, au génie, au talent, aux mœurs, au caractère singulier des abeilles, sans leur accorder un raisonnement ? Pouvons-nous présenter à notre esprit une fourmilière, observer la paix, l’union, la bonne intelligence, l’activité, les secours mutuels de cette petite république si bien disciplinée, sans accorder aux fourmis la puissance de raisonner ? Peut-on penser à la vie républicaine, à l’adresse, à l’intelligence, à tant de qualités sociales des castors, sans avouer que ces animaux réfléchissent et raisonnent ?

Observons le lièvre, cet animal naturellement peureux, et qui doit souvent son salut à son caractère inquiet et défiant, à la finesse de l’organe de l’ouïe, et à la rapidité de sa course. Supposons qu’il veuille ou qu’il doive, en hiver, traverser une petite rivière glacée depuis peu : s’il se met à la passer sans précaution, — ce qu’il ne fait jamais — si la glace n’est pas assez solide, si elle se rompt, s’il s’enfonce dans l’eau, c’est sa faute, il n’a agi que par instinct. Mais s’il applique premièrement son oreille très fine, pour voir s’il entend, ou non, le bruit de l’eau qui court sous la glace, — ce qu’il fait toujours — il agit avec raisonnement.

Mettez un petit chien sur une table, jetez sur le plancher, devant ses yeux, quelque morceau