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Page:La Rhétorique des putains, 1880.djvu/129

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courir après des fantômes ? Je sais bien que, aussitôt éveillée, le prestige de l’illusion cesse, et tout s’évanouit.

MARTHE

Je ne vous nie pas cela ; mais aussi, vous devez m’accorder que les rêves de ce genre deviennent souvent des réalités.

Mais je veux être tout à fait raisonnable, puisque l’on parle de raison. J’avoue qu’on ne doit jamais forcer son tempérament ; que l’on ne peut forcer l’âge où les tempéraments se développent, et qu’il faut toujours agir selon noire complexion. Les uns à treize ans auront déjà un penchant insurmontable à la bagatelle, tandis que d’autres à vingt ans seront insensibles aux traits de l’amour. Mais tôt ou tard l’amour veut que ses droits soient respectés. Nous avons un proverbe qui dit : « Tout cheval, jeune ou vieux, doit casser sa bride. » Que ceux qui n’ont point de tempérament soient tranquilles et chastes, à la bonne heure ; mais que ceux qui en ont, à quelque âge que ce soit, cèdent à sa force ; c’est la voix de la raison, c’est l’ordre de la nature… Écoutez, s’il vous plaît, une jolie historiette.

Un père avait quatre filles ; il leur avait donné une éducation vraiment philosophique. Il leur tint un jour ce discours :

« — Il se présente un bon parti pour une de vous quatre. Le prétendu prendra de ma main