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Page:La Rhétorique des putains, 1880.djvu/143

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S’il s’élève quelque dispute entre frères, entre amis, adieu la parenté, adieu l’amitié : l’honneur veut qu’on se batte, et celui qui tue son frère, est le plus honoré. Dieu ! quel honneur !

Une fille ou une femme se laisse embrasser, se laisse donner un baiser, serrer la main, manier les tétons ; l’honneur lui reste encore. Elle se laisse toucher l’endroit le plus sale de son corps, et l’honneur s’en va. Quelle folie !

Messieurs les maris veulent toujours avoir leur passe-partout, et entrer où bon leur semble, sans se déshonorer ; et ils ont attaché l’honneur à la porte de leurs femmes, pour qu’elle ne soit ouverte qu’à eux. Quelle fourberie !

Une pauvre fille laisse entrer quelqu’un dans son jardin, et elle est vouée à l’infamie. Et celui qui a ouvert, qui a dépouillé le parterre, peut s’en aller tête levée, et chanter victoire. Quelle injustice !

On nous enseigne à faire honneur à notre siècle, à notre pays. Le siècle de l’humanité va paraître ; notre pays va jouir d’une parfaite liberté. Si cela arrive, qu’on déclare donc que ce n’est plus faire une tache à l’honneur que de servir l’humanité, que de suivre les lois de la nature. En tant de pays, comme je l’ai déjà dit, on se fait même gloire de ces actions humaines ; et ces actions ne seront déshonorantes que chez nous, que pour notre sexe ?

Méprisez, mademoiselle, l’opinion du vulgaire.