Aller au contenu

Page:La Rhétorique des putains, 1880.djvu/181

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 25 —


vous séparer l’un de l’autre qu’à la mort. Ces protestations sont sincères de votre côté, mais vous n’êtes pas payée de retour : votre attachement pour lui est sans bornes, son attachement pour vous est de courte durée ; souvent, après des témoignages apparents d’une affection inviolable, le perfide, en sortant de chez vous, passe entre les bras d’une autre. Le dégoût, la satiété s’empare de lui ; l’objet nouveau est d’un meilleur aliment à sa lubricité ; il vous quitte, il vous oublie ; que deviendrez-vous ? Délaissée, méprisée, vous versez des torrents de larmes, vous êtes plongée dans l’amertume ; l’empreinte de la douleur se répand sur toute votre personne ; vous languissez, vous tombez malade, les chagrins dévorants avancent votre âge et vous ouvrent les portes du tombeau.

Aimez un seul homme ; il vous faut donc renoncer au projet de vous former un état brillant. Supposons qu’il vous affectionne pour quelque temps, qu’il soit riche, généreux ; lorsqu’il s’aperçoit que votre entretien épuise ses richesses, qu’il voit sa fortune fort bornée, ses désirs le deviennent aussi ; il commence à moraliser et à se dire à lui-même : « L’homme est bien fou de jeter son argent dans un trou qui ne se remplit jamais ! On appelle plaisir ce qui n’est qu’un étourdissement de l’âme ; on appelle volupté ce qui n’est qu’une insatiable fureur. » Cette morale du moment l’oblige à vous quitter ;