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Page:La Rhétorique des putains, 1880.djvu/200

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MARTHE

N’en sentez-vous pas le prix ? Pouvez-vous balancer dans le choix ? Cinq cents louis pour premier gage !… Il n’a ni femme ni enfants ; il a des parents, mais qu’il ne veut pas reconnaître ; parce qu’ils ne sont que des roturiers, comme il l’était lui-même, il y a quelques années. Il vous prodiguera les richesses que l’oppression et la fraude lui ont amenées ; il peut vous faire son héritière ; la fortune se plaît à mettre à vos pieds tous ses trésors, et vous ne voudriez pas assurer votre bonheur ?

ANGÉLIQUE

Vous m’offrez donc du pain sec et moisi ? À la bonne heure. Mais cela m’empêchera-t-il de goûter mon mets délicieux ? Mon jeune marchand, que j’attends encore ce soir…

MARTHE

Ce soir ! Dieu ! cela gâte toutes mes mesures. Mais, ce soir même, ce fermier doit venir pour passer la nuit avec vous !… Jamais, mademoiselle, jamais vous ne devez donner parole à vos amants de les voir deux jours de suite. Vous devez avoir mille prétextes toujours prêts à alléguer pour remettre à d’autres temps vos entretiens. Pourquoi vous laisseriez-vous obséder par quelqu’un pour que d’autres ne puissent vous approcher ? Est-ce là le fruit de mes leçons ?… Vous pleurez, mademoiselle ? Vous me faites pitié, je veux vous soulager. Avez-vous remarqué que Marguerite