Aller au contenu

Page:La Rhétorique des putains, 1880.djvu/234

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 74 —


Marguerite pourra l’arrêter poliment et lui dire d’un ton plaintif :

— Eh bien ! monsieur, avez-vous tiré ma chère maîtresse de sa sombre mélancolie ? Elle vous a peut-être fait un secret de son chagrin. Ah ! je la connais, elle mourrait plutôt que de parler, de peur qu’on la soupçonnât d’aimer par intérêt ; mais moi qui crains beaucoup pour sa santé, je ne puis me taire. Sachez, monsieur, que mademoiselle Angélique vient de perdre un gros pari qu’elle a fait avec une dame du voisinage ; elle ne se trouve pas en état de payer, et elle vendra plutôt quelqu’un de ses bijoux que de vous prier de lui prêter de l’argent.

Il est à croire qu’il demandera de combien est le pari, et qu’il vous apportera de quoi le payer.

Mais surtout, lorsqu’on vous donne de l’argent, ayez l’art de n’en prendre que la moitié, et obligez votre amant, sur sa parole d’honneur, à employer l’autre moitié en œuvres de charité. Ouvrez vous-même votre cœur, naturellement bon, aux sentiments de bienfaisance et d’humanité. En vous promenant, en vous rendant à l’église, ou aux spectacles, ne renvoyez jamais les mendiants nécessiteux que vous rencontrerez sur votre chemin, sans leur donner quelque secours ; adoucissez, de temps en temps, les misères de quelques pauvres familles ; bientôt la renommée remplira la ville de vos bienfaits ;