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Page:La Rochefoucauld - Œuvres, Hachette, t1, 1868.djvu/295

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ET MAXIMES MORALES

CCCXIX

On ne sauroit conserver longtemps les sentiments qu’on doit avoir pour ses amis et pour ses bienfaiteurs[1] si on se laisse la liberté de parler souvent de leurs défauts[2]. (éd. 3.)

CCCXX

Louer les princes des vertus qu’ils n’ont pas, c’est leur dire impunément des injures[3]. (éd. 3*.)

CCCXXI

Nous sommes plus près d’aimer ceux qui nous haïssent que ceux qui nous aiment plus que nous ne voulons. (éd. 3.)

CCCXXII

Il n’y a que ceux qui sont méprisables qui craignent d’être méprisés[4]. (éd. 3.)

  1. Bienfacteurs, dans les éditions de 1671 et de 1675.
  2. La Bruyère (de la Société et de la Conversation, no 62, tome I, p. 236) : « L’on ne peut aller loin dans l’amitié, si l’on n’est pas disposé à se pardonner les uns aux autres les petits défauts. »
  3. Var. : Louer les rois des qualités qu’ils n’ont pas n’est que leur dire des injures. (Manuscrit.) — L’annotateur contemporain conclut ainsi : « Que l’on dit donc d’injures, et d’injures même dont on est pavé ! » — Tacite rapporte (Annales, livre XIII, chapitre iii) que quand Néron, faisant le panégyrique de l’empereur Claude, le loua de sa prévoyance et de sa sagesse, on ne put s’empêcher de rire, bien que le discours eût été composé par Sénèque. — Montaigne dit à peu près dans le même sens que la Rochefoucauld (Essais, livre I, chapitre xxxix, tome I, p. 354) : « C’est vne espèce de mocquerie et d’iniure de vouloir faire valoir vn homme par des qualitez mesaduenantes à son rang. »
  4. « Faux, dit l’annotateur contemporain : il y a bien des gens de