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SUR LA ROCHEFOUCAULD

L’ex-secrétaire nous apprend lui-même qu’en 1657, se trouvant « en argent comptant, » il songea « à traiter des anciennes dettes de la maison de la Rochefoucauld. » Il obtenait « des remises, « qu’il mettait au profit du duc. Il écrit ailleurs, dans ses Mémoires, à la date de 1661 : « M. de la Rochefoucauld, n’étant pas trop bien dans ses affaires, me demanda de vouloir bien lui faire le plaisir de recevoir les revenus de ses terres, et de lui faire donner, tous les mois, quarante pistoles pour ses habits et ses menus plaisirs : ce qui a duré jusqu’à sa mort. Non-seulement j’avois soin de faire payer les arrérages, mais encore d’éteindre beaucoup de petites dettes de sa maison, tant à Paris qu’en Angoumois : ce qui lui faisoit un plaisir si sensible, qu’il en parloit souvent pour mieux le témoigner. M. le prince de Marcillac, voulant aller à l’armée, se trouva sans argent ni équipage, et désirant d’y porter un service de vaisselle d’argent, sa famille jugea qu’il lui falloit jusqu’à soixante mille livres : je les prêtai, et elle m’en fit une constitution. Il m’emprunta encore, de temps en temps, jusqu’à cinquante mille livres ; et ayant encore eu besoin de vingt mille livres, je me disposai à les lui prêter ; M. de Liancourt, qui sut jusqu’où ces emprunts alloient, et qu’ils n’étoient pas trop assurés, dit qu’il s’en rendoit caution, pour que je ne pusse y perdre. » La même année, comme la Rochefoucauld délibérait, non sans un crève-cœur bien naturel, s’il ne vendrait pas son bel équipage de chasse, ce fut encore Gourville qui lui épargna cet ennui, en s’accommodant « avec celui qui en avoit soin » et en payant à ce dernier « la moitié de la dépense » par mois et par avance. Enfin, en 1662, le duc, toujours à court d’argent, obtient de l’industrieux homme d’affaires qu’il fasse « le salut de sa maison » en lui achetant au prix de trois cent mille livres, c’est-à-dire « au denier trente, » sa terre de Cahuzac, « qui valoit dix mille et quelques livres de rente[1]. »

La Rochefoucauld avait lui-même sur le prince de Condé de grosses créances, qui remontaient au temps de la Fronde ; mais l’auguste débiteur ne s’acquittait que fort lentement ; treize ou quatorze ans après la guerre, le duc était encore

  1. Mémoires de Gourville, p. 322, 345, 356 et 357, 360 et 361.