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Page:La Saga de Nial, trad. Dareste, 1896.djvu/14

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pourtant pas un homme vindicatif ni méchant. L’acte qu’il exécute est un acte qu’il est obligé de commettre par devoir, et il y est poussé de la façon la plus terrible. Chez lui comme chez Njal, on trouve dans tous les moments difficiles un jugement calme et sûr : et à ce point de vue il fait contraste avec les autres caractères, plus farouches. L’auteur a su le saisir et s’en servir pour donner au récit la conclusion la plus naturelle et en même temps la plus intéressante. Les deux plus coupables parmi les incendiaires doivent mourir de la main de Kari, mais Flosi et lui vont tous deux en pèlerinage à Rome et reçoivent l’absolution : et c’est un beau spectacle de voir comment le christianisme introduit un esprit d’apaisement dans une action inspirée au début par toute la sauvagerie du paganisme, de voir comment Kari revient, fait naufrage, et se rend à la demeure de son ennemi pour lui demander l’hospitalité, comment ils se donnent l’un à l’autre le baiser de paix et se réconcilient pour toujours.

Ces quelques remarques n’ont pour but que d’appeler l’attention du lecteur sur ce récit considéré comme œuvre d’art. Il ne serait pas difficile de tirer encore plus avant dans l’étude de l’action et des caractères, mais n’y a rien de plus fastidieux en ce monde que d’analyser la beauté. Il faut se contenter de dire : Regarde si elle est là. Celui qui ne peut la voir ni la reconnaitre, qu’il reste aveugle ! Pour ma part, je me crois en droit de déclarer que tout en voyant dans cet écrit un récit pleinement historique, je le crois propre à fournir à l’art moderne des sujets excellents. Ne serait-ce pas, par exemple, un sujet