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Page:La Société nouvelle, année 12, tome 1, 1896.djvu/172

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LA SOCIÉTÉ NOUVELLE

mur devra être décoré de quelque belle et intéressante copie. Il faudra également un vase ou deux pour y placer des fleurs, qui parfois sont nécessaires, surtout si vous habitez la ville. Il y aura enfin le foyer qui, dans notre climat, est nécessairement le principal objet de la chambre.

Voilà tout ce dont nous avons besoin, surtout si le plancher est bon. Sinon, comme c’est presque certainement le cas dans une maison moderne, j’admets un petit tapis qu’en deux minutes on puisse rouler hors de la chambre. Mais nous devons avoir soin qu’il soit beau, sinon il nous causera beaucoup d’ennuis.

Voilà, à moins d’être musicien et d’avoir encore besoin d’un piano, (en ce cas, sous le rapport de la beauté, nous sommes mal lotis), tout ce qu’il nous faut. Nous ne pouvons ajouter que peu de chose à ces objets nécessaires, sans nous incommoder, sans gêner notre travail, nos pensées, notre repos.

Si ces objets sont fournis au plus bas prix auquel on puisse les avoir bien et solidement faits, ils ne doivent pas coûter beaucoup. Ils sont si peu nombreux que ceux, en état de se les procurer, pourraient également s’imposer le sacrifice de les avoir convenables et beaux. Et tous ceux qui s’occupent d’art devraient faire leur possible pour qu’il en soit ainsi, et veiller à ce qu’il ne se glisse pas dans ces objets de faux art, rien qui avilisse l’homme, soit pour le faire, soit pour le vendre. Je suis persuadé que si tous ceux qui ont le respect de l’art prenaient cette peine, cela ferait une impression profonde sur le public.

D’autre part, vous pourrez rendre cette simplicité aussi coûteuse qu’il vous plaira ou sera possible. Vous pourrez pendre à vos murs des tapisseries au lieu de les blanchir à la chaux ou d’y coller du papier. Vous pourrez les couvrir de mosaïque ou y faire peindre des fresques par quelque peintre. Tout cela n’est pas du luxe, s’il est fait en vue du beau et non pour l’étalage. Il ne viole pas notre règle d’or : N’ayez rien chez vous que vous ne sachiez beau ou croyiez utile.

Tous les arts ont leur origine dans cette simplicité. Plus haut l’art s’élève, plus grande est la simplicité. J’ai parlé de l’ameublement d’une maison d’habitation, d’une chambre dans laquelle nous mangeons et buvons et passons des heures en famille. Mais s’il s’agit d’endroits qu’on désire embellir d’une façon toute spéciale, en raison de la solennité ou de la dignité de leur destination, ils seront encore plus simples et contiendront peu de choses, à part les murs, tout nus, rendus aussi beaux que possible. Saint-Marc à Venise contient très peu d’objets mobiliers, beaucoup moins que la plupart des églises catholiques. Son aimable et imposante mère, Sainte-Sophie, à Constantinople, en avait encore moins, même du temps où elle