Page:La Société nouvelle, année 8, tome 1, 1892.djvu/505

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bien, il va de soi qu’il est utile d’avoir des fourneaux, des fours à verre d’une grande dimension et un grand nombre de choses dont on doit se servir ; aussi il y a naturellement beaucoup de ces ateliers, car il serait ridicule qu’un homme aimant à faire des pots ou à souffler le verre, habitât loin des ateliers et fût obligé de quitter le travail qu’il aime. »

« Je ne vois pas de fumée sortir des fourneaux, » dis-je.

« De la fumée, répondit Dick ; pourquoi verriez-vous de la fumée ? »

Je me tus, et il continua :

« C’est un joli emplacement à l’intérieur, quoique ce soit aussi simple que vous le voyez à l’extérieur.

Quant aux métiers, remuer la terre glaise doit être un travail agréable, souffler le verre est une besogne un peu plus étouffante, mais quelques gens l’aiment beaucoup en vérité ; et cela ne m’étonne pas : il y a une telle sensation de puissance quand vous devenez adroit dans l’art de traiter le chaud métal. Cela fait une quantité d’agréables travaux, dit-il en souriant ; cependant, n’importe quel soin vous prendrez de ces choses, elles casseront un jour ou l’autre ; aussi il y a toujours beaucoup à faire. »

Je continuais à me taire et méditais.

Nous arrivâmes justement auprès de plusieurs hommes réparant la route, ce qui nous retarda un peu ; mais je n’en étais pas fâché, car tout ce que j’avais vu jusqu’à présent ne me paraissait être qu’une partie de vacances d’été, et j’avais envie de voir comment ces gens s’y mettaient pour faire un travail réel et nécessaire.

Ils venaient de se reposer et s’étaient justement remis à travailler de nouveau quand nous arrivâmes, de sorte que le bruit des pics me réveilla de ma méditation. Il y avait là à peu près une douzaine de jeunes gens solides, ressemblant beaucoup à ceux qui auraient formé, dans les jours que je me rappelais, le personnel d’une partie de canotage d’Oxford, et pas plus embarrassés de leur besogne ; leurs vêtements de dessus se trouvaient au bord de la route, rangés avec ordre sous la garde d’un garçon de six ans ; celui-ci avait jeté son bras autour du cou d’un grand mâtin, qui était aussi paresseusement heureux que si ce jour d’été avait été fait pour lui seul. Comme je regardais le tas de vêtements, je pouvais voir les reflets de l’or et de la soie dont ils étaient brodés, et je jugeais que quelques-uns de ces ouvriers avaient les mêmes goûts que le « dustman » (1) chargé d’or de Hammersmith. A côté se trouvait un grand panier qui paraissait, d’après certaines indications, contenir du pâté froid et du vin ; une demi-douzaine de jeunes

(1) Nom donné a ceux qui en Angleterre ramassent la boue devant les portes des maisons, le matin.