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respect pour les convenances, ils s’éloignèrent ravis de se trouver ensemble, Ils arrivèrent bientôt au palais, où se trouvaient réunis la noblesse calabraise et quelques seigneurs venus de Naples. Lorsqu’ils apparurent, un murmure approbateur les accueillit… Rien de plus grâcieux, il est vrai, ne pouvait s’offrir à la vue. Cécilia, brune enfant d’Italie, aux mouvements heurtés, aux grands yeux noirs qui inspirent l’amour, était l’image de ces roses vivaces qui boivent avec ardeur les douces rosées de mai, et dont les corrolles s’empourprent aux rayons du soleil. Pour Giovanni, dont la pâle figure contrastait avec les traits animés de sa compagne, il ressemblait à ces arbustes souples et élancés qui se courbent mollement sous les baisers du vent.

— C’est l’amour et sa sœur, répétait-on de toute part dans la noble assemblée !…

Et nos deux enfants, surpris de ces éloges, sentirent les naïves rougeurs d’une joie enfantine colorer leurs fronts.

— Gateano, dit la duchesse à un homme qui se trouvait près d’elle, voilà le jeune enfant dont je vous ai parlé ; rien de plus angélique que sa voix ; vous l’entendrez, mon ami. Cécilia en a fait son chevalier, et je protège ses innocentes amours ; mais l’heure presse et les voitures nous attendent.

Peu d’instants après toute la population de Cassoria était sur le passage de la belle société, qui se rendait à la villa du duc. Ludovic et Ninetta ne cherchaient que leur fils ; et lorsque ce dernier parut, le tailleur lui fit un geste bienveillant de la main.

— Vous connaissez ces personnes, lui demanda le prince Stigliano, dans la voiture duquel il se trouvait ?

— Ce sont mes parents, répondit Giovanni,

Le prince Stigliano, écuyer du roi de Naples et son confident intime, était une énigme pour les courtisans, Arrivé il y avait dix ans, sans protection à la cour, il était parvenu à la position élevée qu’il occupait, sans employer ni les banales