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LES ANDROGYNES

ges, se raidissait dans la rue, afin de garder une démarche ferme, et parfois, à la dérobée, s’appuyait aux murs pour reprendre ses forces. Sa mémoire, jadis merveilleuse, avait des lacunes ; il lui fallait souvent une fatigante tension d’esprit pour se rappeler les choses les plus simples. Dans ces dispositions, il résistait vaguement aux caprices de Jacques dont les exigences prenaient un caractère de plus en plus agressif.

Ils s’en allaient à l’aventure, alors que les rayons du soleil, comme des baudriers d’or, bandaient les rues étroites des quartiers de vice et de misère. Ils longeaient des boutiques sordides, des boucheries noires de sang coagulé où des quartiers de viande pendaient à des crocs de fer avec des foies et des cœurs de bœufs aux grosses artères bleues saillantes. Sur leur tête tombait l’eau des pots de fleurs, et des « Jenny l’ouvrière », penchées aux mansardes, riaient en les voyant se secouer comme des caniches, sous le jet trop impétueux de leur arrosoir.

Mais Jacques accueillait sans aménité ces fantaisies féminines, et il fuyait vers des