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LES ANDROGYNES

distraire, essayait quand même d’éveiller ses convoitises, n’ayant pas d’autre félicité à lui offrir. D’une main impatiente, elle enlevait les épingles de sa coiffure, secouait le pavot rouge qui glissait à ses pieds comme une fleur de meurtre agonisante et maléfique, une fleur de honte qui disait son métier, attirait sur elle l’attention des chercheurs de baisers, au détour des rues. Sa libre chevelure l’enveloppait alors comme une fourrure tiède, magnétique, où il plongeait doucement son front.

Elle savait des danses, aussi, des danses perverses et naïves, que Lucienne, retroussant ses jupes, lui avait enseignées. Comme elle, pinçant son jupon écarlate, elle levait la jambe, pivotait sur le bout d’un pied, et, les doigts écartés, passait sur son mollet grêle un imaginaire archet de violon. Ses gestes, inconsciemment précis, appelaient l’étreinte brutale, l’étreinte du mâle sans simagrées d’amour.

Elle était gracieuse, pourtant, dans ses danses vulgaires et d’une certaine adresse. Le grand Charles, d’ailleurs, pour l’assouplir, l’avait mise contre un mur, la jambe en