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SAPHO, DOMPTEUSE

la force de saluer les spectateurs et de sortir toute chancelante. Puis, enfin, en sûreté, dans sa loge, elle perdit connaissance.

Christian, ivre d’émotion, n’avait pas bougé, il se persuadait que la jeune femme allait mourir, et, par un revirement étrange, se sentit soudainement incapable de vivre sans elle.

Tandis que la salle se vidait lentement, dans le bruit des interrogations et des réflexions apitoyées, il se mettait à écouter, le front dans les mains, la voix vengeresse qui lui parlait d’expiation et de suicide. Il laissait farouchement venir à son oreille ce bruit de trépas, qu’on entend sans cesse dans l’existence comme une symphonie lointaine qui, parfois, se rapproche et devient assourdissante, parmi les plaintes et les sanglots. Il se laissait aller aux tentations qui parlent à l’angoisse de tout ce qui tue si vite, si facilement, de tout ce qui chasse la souffrance comme un souffle chasse une feuille tombée de l’arbre. Tout ce qui guérit du mal de vivre le sollicitait ardemment ; il tâtait, dans sa poche, un revolver qui ne le quittait jamais.