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LE CAVALIER MISEREY.

que de l’auteur de la Cousine Bette ; encore celui-ci n’était-il pas un réaliste. Les instincts de M. Zola répugnent à l’observation directe. De tous les mondes, c’est le sien qu’il semble connaître le moins. Il devine, et c’est dans la divination qu’il se plaît. Il a des visions, des hallucinations de solitaire. Il anime la matière inerte, il donne une pensée aux choses. Du fond de sa retraite, il évoque l’âme des foules. C’est à Médan que se cache le dernier des romantiques.

Ajoutez à cela que l’armée que nous peindra M. Zola est celle de Sébastopol, de Magenta et de Reichshoffen ; c’est une armée historique dont il ne reste plus que le souvenir, souvenir cher à la patrie, mais déjà lointain. Le cadre immense dans lequel M. Zola s’est volontairement enfermé l’attache à une époque qui n’est plus la nôtre. Ses héros appartiennent à l’histoire. M. Zola, retenu dans le second empire, est une façon de Walter Scott. Ce n’est pas moi qui en fais la remarque : c’est M. Jules Lemaître. Elle est juste. Le naturalisme de l’auteur de Rougon-Maquart se complique d’archaïsme. Il lui faudra bientôt recueillir ses documents humains dans les musées. Quand le temps sera venu de préparer son roman militaire, il examinera les vieux flingots des vainqueurs de Solférino, comme le romanesque Écossais contemplait une antique claymore arrachée d’un champ de bataille par le tranchant de la charrue.

Il est donc possible que M. Abel Hermant soit le