Page:La Vie littéraire, I.djvu/110

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le grand docteur ne s’y confesse pas assez. C’est un livre spirituel qui satisfait mieux l’amour divin que la curiosité humaine. Augustin se confesse à Dieu et non point aux hommes ; il déteste ses péchés, et ceux-là seuls nous font de belles confessions qui aiment encore leurs fautes. Il se repent, et il n’y a rien qui gâte une confession comme le repentir. Par exemple, il dit, en deux phrases charmantes, qu’on le vit tout petit sourire dans son berceau ; et tout aussitôt il s’efforce de démontrer « qu’il y a de la corruption et de la malignité dans les enfants mêmes qui sont encore à la mamelle. » Le saint me gâte l’homme. Il conte que, dans son enfance, il y avait, auprès de la vigne paternelle, un poirier chargé de poires, et qu’un jour il alla avec une troupe de petits polissons secouer l’arbre et voler les fruits qui en tombaient. Fera-t-il à ce sujet un de ces tableaux familiers comme on en découvre avec enchantement dans les premières pages des Confessions de Jean-Jacques, ou, si c’est trop demander, quelque élégant et sobre récit dans le goût des petits conteurs grecs ? Non ! il s’écrie : « Voilà quel était, ô mon Dieu, le misérable cœur qu’il a plu à votre miséricorde de tirer du fond de l’abîme ! » Comme si, pour un gamin, c’était tomber dans un abîme que de voler quelques méchantes poires !

Il confesse ses amours, mais il ne le fait point avec grâce parce qu’il le fait avec honte. Il ne parle que des « pestilences » et des « vapeurs infernales qui sor-