dirait une âme voluptueuse, ou plutôt un esprit très sensuel et très subtil, le rêve pervers d’un délicat. M. Pottier (dont les notices, je le dis en passant, sont d’excellents mémoires d’archéologie et d’art) m’apprend que cet Éros apporte un pot de fard à sa mère. Mais il est lui-même le fard et les onguents de la beauté : il est l’éternel désir. C’est par lui que Vénus est belle.
Les coroplastes de Myrina ont beaucoup de goût pour les figures ailées. Leur art, extrêmement sensuel, est en même temps très idéal. Ils excellent à donner un mouvement sublime à des formes voluptueuses. Ils mêlent avec une fantaisie étrange la grâce céleste et la langueur mortelle, en sorte que cet art est à la fois aphrodisiaque et presque douloureux. C’est le rêve des sens, mais c’est le rêve encore. Ces Éros, ces Atys beaux comme des vierges, ces Aphrodites nues, ces Sirènes funéraires, ces Victoires mêlées aux Éros dans le cortège de l’amante divine d’Adonis, ces Bacchus et ces Ménades, enfin tous ces petits dieux peints de fraîches couleurs, je les vois en imagination rangés, tout neufs, dans la boutique de l’humble coroplaste, comme aujourd’hui les Vierges et les Saint-Joseph dans les vitrines des magasins de la rue Saint-Sulpice. Ce devait être la joie des bonnes petites filles et des vieilles femmes d’alors.
Il y a une frappante analogie entre les terres cuites de Myrina et les figurines de plâtre peint qu’on vend dans le voisinage de nos églises catholiques. C’est un nouveau personnel divin qui a été substitué à l’autre et qui répond aux mêmes besoins des âmes. La petite Aphrodite