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Page:La Ville de Mirmont - La Mort de Sancho, paru dans Le Quotidien du 4 septembre 1927.djvu/4

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Jean de la Ville de Mirmont est un des « moins de trente ans » de 1914, que la guerre a pris au moment où ils commençaient à écrire une œuvre pleine de promesses et qui sont entrés dans la mort avant d’avoir connu la douce gloire des Muses… Une plaque de marbre, sur une maison de l’Île-Saint-Louis commémore le délicat et discret souvenir de l’auteur des Dimanches de Jean Dézert et de L’Horizon chimérique, tombé, devant Verneuil, le 28 novembre 1914.



C’est un fait avéré ― puisque le notaire et le curé, personnes dignes de créance, en ont témoigné ― qu’Alonzo Quijano-le-Bon, plus connu sous le nom de Don Quichotte, décéda naturellement dans son lit, après avoir légué ses biens, meubles et immeubles, à sa nièce Antonia.

Par contre, on ignore encore comment mourut Sancho Panza. Le sage Cid-Hamed-Ben-Enjeli lui-même reste muet sur les événements qui marquèrent les derniers jours de cet écuyer fidèle. Malgré le caractère apocryphe des seuls documents que nous possédions à cet égard, nous ne pouvons donc moins faire que de les livrer à la curiosité du lecteur bénévole.

On aurait tort de croire que Sancho Panza demeura insensible au trépas du chevalier son maître. Il serait faux, toutefois, de prétendre qu’il ne se trouvât point parfaitement heureux, après tant d’aventures, entre sa femme Thérèse, sa fille Sanchica et son âne. Aussi, pendant plusieurs jours, essaya-t-il en vain d’évaluer la part qu’il devait à la tristesse et celle que réclamait sa joie. Parmi les nombreux proverbes dont, jusque-là, il s’était composé, tant bien que mal, une sagesse, aucun n’offrait, semble-t-il, de formule définitive capable de lui rendre la sérénité. Mais avec le temps qui élime les regrets et du bonheur fait, à la longue, une habitude pareille aux autres, Sancho retrouva son état normal, c’est-à-dire exempt