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Page:La Ville de Mirmont - La Mort de Sancho, paru dans Le Quotidien du 4 septembre 1927.djvu/5

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d’émotions inutiles. Il reprit, une à une, ses occupations rurales. Il sut faire oublier ses erreurs passées. On le compta, désormais, au nombre des honnêtes gens qui s’en remettent à Dieu et au roi pour le rétablissement de la justice sur la terre, et à la Sainte-Hermandad pour le maintien du bon ordre parmi les hommes. Il ne devait, du reste, rien à personne. Des mœurs régulières, une saine nourriture, l’absence de soucis, favorisaient, sur son heureuse physionomie, l’épanouissement de sa santé physique et morale.

Les jours de fête, il allait rendre ses devoirs à Antonia Quijano, maigre et vêtue de deuil, qui vivait demoiselle avec la gouvernante de feu son oncle, dans l’antique et froid logis dont plusieurs fenêtres restaient à jamais fermées. Le soir, en revenant des champs, il s’arrêtait au cimetière pour se signer sur la tombe du défunt. Mais il ne s’attardait guère en ces lieux où l’ombre attristait sa pensée.

― « Mari », lui demandait parfois Thérèse, « quand donc penserez-vous à employer les écus d’or rapportés de votre dernier voyage pour surélever d’un étage notre maison ?

― « Ma femme, répondait Sancho, Tolède ne s’est point bâtie en un jour, et le pivert de la Sierra Morena construit son nid petit à petit. D’ailleurs, comme l’on dit, mieux vaut l’aisance sous le chaume que la gêne sous les lambris. »

― « Père, lui demandait d’autres fois sa fille, quand songerez-vous à m’établir avec mon cousin Pedro ? »

― « Sanchica, répondait Sancho, ne te mets point en peine à ce sujet. Chacun trouve toujours chaussure à son pied et bonnet à sa tête. Ton cousin