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DE LA LANGUE BRETONNE.

respect l’original, [1] Ce n’est pas à dire que l’arrangement des mots, arbitraire en soi, ne se soit pas modifié, et que la similitude de syntaxe exclue toute différence accidentelle ; mais s’il est quelques variétés inévitables, quant aux règles particulières, les principales sont restées les mêmes. Ainsi Ghéraint, comme tous les dialectes de la langue celtique, et avec l’autorité de tous les écrivains bretons du ve au xiie siècle, qui peuvent fournir des exemples, indique l’individu ou l’espèce, par l’article défini ou indéfini, le premier supprimable, quand un nom propre se trouve réuni à un nom commun ; il marque les rapports des mots entre eux, soit par des prépositions qui tiennent lieu de cas, soit par la juxta-position des mots [2]. Quand de deux substantifs dépendant l’un de l’autre se forme un mot nouveau, le régissant se place à volonté avant ou après le régi, mais le plus souvent avant lui [3]. Les adjectifs peuvent être mis avant ou après le substantif, s’accorder partiellement ou non en nombre et en genre avec les substantifs, c’est-à-dire, varier ou ne pas varier leur terminaison, selon que ceux-ci sont du féminin ou du masculin, au singulier ou au pluriel [4]. Ces terminaisons des différents substantifs, au masculin ou au féminin, au singulier ou au pluriel, ont tous les anciens caractères celtiques. Les degrés de comparaison de l’adjectif se forment, soit en ajoutant au positif une terminaison variable pour le comparatif et le superlatif, soit en le faisant précéder ou suivre d’un adverbe, soit, pour le superlatif seulement, en répétant deux ou trois fois le positif, caractère remarquable de jeunesse, car les enfants emploient familièrement cette manière de parler, quand ils veulent peindre un objet qui les a frappés [5].

  1. J’en ai vu une copie au collège de Jésus, à Oxford, faite en 1270, par Edern, surnomme Tévod-aour ou langue d’or. Elle commence au folio 1117e du mss intitulé Le livre rouge d’Hergest.
  2. Boet abendiget er gwez dû
    A lennouaz ë (al) lagad oez dû
    Gwallog ap Léinog, penn-lu.

    (Gweznou.)

    Soit maudite l’oie noire qui tira l’œil qui était noir de Galgac le fils de Leinog, le chef de guerre. (Myvyrian. Arch. T. I. p. 166.)

    Boet abendiget eh gwez gwenn,
    A lennouaz hé lagad 0’ hé penn.

    Soit maudite L’oie blanche qui tira son œil DE sa télé. {Ibid.)

  3. Aneurin dit kadki, chien de combat, au lieu de ki kad ; mais en même temps il dit kad traez, le combat du rivage, au lieu de traez kad. (Myvyr. Arch. T. 1. p. 4.)
  4. Ainsi les auteurs de l’époque qui nous occupe écrivaient à volonté déved bic’hAK et déved bic’hES. de petit brebis et de petites brebis ; davad bichxy et davad bichv. N, un petit brebis et une petite brebis ; mais, en parlant, on changeait invariablement la consonne muable de l’adjectif de forte en douce, et l’on disait : davad vie han, une petite brebis, et le genre se trouvait indiqué par cette permutation. E {aT)gour am rozaz (aroaz d’in) ë (ar) gwin A’r (hag ar) méirc’h mor (meûr). « L’homme qui me donna le vin et les grands chevaux, » dit Taliésin. (Myvyr. ï. I. p. 22.) Avec l’accord en nombre, av ce mcirc’A, pluriel de marc’h, il eût fallu merion, pluriel de mor, grand ; mais ailleurs, il fait accorder l’adjectif. Toutefois, il n’y a que trcs-peu d’adjectifs qui admettent cet accord inobligatoire en nombre, comme il n’y en a aussi que quelques-uns qui soient susceptibles de l’accord en genre, et seulement au singulier ; de sorte que l’accord en genre et en nombre serait moins une règle qu’une exception à la règle.
  5. C’hocékac’h na (éged) gwin gwenn. (Tal.) Plus doux que du vin blanc. (Myvyrian. Arch. T. I. p. 67. ; D’id gwin gorré er gwellaf. (Ib.) A toi du vin au-dessus du meilleur (Ib. p. 47.) Mor [meûr) trdant eo gen-ev. (Merzin.) Je suis très-misérable (mot à mot, très-misérable est avec moi). (Myvyr. Arch. p. 48.) N’cdfeoJ GWAs urz dén nag (éged) urz églouiz (ilizj. (Merzin.) Le commandement de l’homme n’est pas plus dur que celui de l’Eglise. (Myvvr. Arch. p. 141.)