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LE JOURNAL D’UNE MASSEUSE

sapins, forêt, rochers, brouillard, chalets. Leysin ? débarquement.

Et j’y suis. Un vieux diable tout ridé, sec et noueux comme un athlète japonais, s’empare de ma malle. C’est le pasteur qui l’a envoyé ! Ah ! c’est le pasteur ? Bien, bien. Il me conduit par un sentier jusqu’à la route étroite. Le village, serré dans un replis du plateau et accoté à la pente de la montagne, semble tout noir avec ses chalets roux aux toits de chaume, d’où montent des filets de fumée dans l’air bleu. Je suis mon guide et je regarde. D’un côté, la haute silhouette du Chamossaire, dont la base se noie sous le fouillis des verdures où gronde la Grande-Eau. En face, la profondeur sombre des bois de sapins qui se perdent sur les hauteurs de Prafandaz, les caravansérails immenses de la Société des Hôtels, les pensions et les chalets de Feydey… Là, le Mont d’Or, le Chaussy tout pelé, le village du Sepey, enfoui au fond de la vallée, les Ormonts avec leurs pâturages, et les deux pointes des Diablerets au-dessous desquelles brille un glacier. Voici la Forclaz, nue et rocheuse, armée et redoutable avec les canons des forts de Savatan, dont les redoutes creusées dans le