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LE JOURNAL D’UNE MASSEUSE

Euphrasies, aient la manie de la comparaison. Ainsi tenez, dans la rue, les voyez-vous se retourner pour dévisager insolemment — oui, madame, insolemment ! la promeneuse qui passe ; et dès qu’elles rencontrent le moindre bout de miroir, aux devantures des cordonniers et des marchands de bidets, les voyez-vous lancer un coup d’œil furtif et porter aussitôt la main à leur voilette ou à leur chignon ! Est-ce de la comparaison, oui ou non ? La femme qu’elles viennent de rencontrer a une boucle comme ça, naturellement, il faut qu’elles aient aussi une boucle, mais comme ceci. Vous me direz : c’est de l’esprit d’imitation. Dites tout de suite que les femmes sont des guenons, pendant que vous y êtes ! Non, elles comparent, elles mesurent la beauté de l’autre au mètre cube de la leur, et naturellement, pour se convaincre que l’autre en aucun cas ne pourrait soutenir la comparaison. Maintenant, vous savez, moi, je m’en f… !

Cette digression ? Dites donc, tâchez d’être un peu poli, hein ! Eh bien, cette digression, à seule fin de prouver que Juliette a dû dire qu’elle était jolie en maints endroits de son manuscrit.

Et vous verrez que j’ai raison.