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Page:La chanson de Roland - traduction 1911.djvu/112

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Vous voyez que je suis blessé à mort.
Je n’ai ni fils, ni fille, ni héritier ;
J’en avais un : on me l’a tué hier soir.
Dites à mon seigneur de venir me voir.
L’Émir a des droits sur l’Espagne,
Je la lui donne sans réserve, s’il lui plaît de l’avoir.
Qu’il la défende ensuite contre les Français.
Je lui donnerai, à l’égard de Charlemagne, un bon conseil,
Et, avant un mois à dater de ce jour, il l’aura vaincu.
Vous lui apporterez les clefs de Saragosse.
S’il croit à mes avis, il n’aura qu’à gagner. »
Les messagers répondent : « Sire, vous dites vrai. »


CCI

Marsile dit : « L’Empereur Charles
A tué mes hommes et ravagé ma terre,
Démantelé et violé mes villes.
Il a campé cette nuit sur les bords de l’Èbre.
J’ai compté qu’il n’est qu’à sept lieues d’ici.
Dites à l’Émir qu’il amène son armée.
Je lui mande par vous de se préparer à la bataille. »
Il leur remet alors les clefs de Saragosse.
Les deux messagers s’inclinent,
Prennent congé et repartent sur ce mot.


CCII

Les deux envoyés sont montés à cheval ;
Rapidement, ils sortent de la cité ;
Tout effrayés, ils vont trouver l’Émir,
Et lui présentent les clefs de Saragosse.
Baligant dit : « Qu’avez-vous trouvé là-bas ?
Où est Marsile, que j’avais mandé ? »
Clarien dit : « Il est blessé à mort.
L’Empereur a franchi hier les défilés,
Car il voulait retourner en douce France.
Pour plus de pompe, il fit garder ses derrières