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Page:La chanson de Roland - traduction 1911.djvu/117

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Et je n’ai plus un seul ami sous le ciel.
Si j’ai des parents, pas un d’eux n’a ta valeur.
Il s’arrache les cheveux à deux mains.
Cent mille Français éprouvent une telle douleur
Qu’il n’en est pas un qui ne pleure amèrement.


CCXI

« Ami Roland, je reviendrai en France.
Quand je serai à Laon, dans ma chambre,
Des étrangers viendront de plusieurs royaumes.
Ils demanderont : « Où est le comte capitaine ? »
Je leur dirai qu’il est mort en Espagne.
Je gouvernerai désormais mon empire dans la douleur ;
Il n’y aura pas de jour que je ne me lamente et que je pleure. »


CCXII

« Ami Roland, homme de cœur, brillante jeunesse !
Quand je serai à Aix, dans ma chapelle.
Des gens viendront me demander des nouvelles.
Je leur en donnerai de terribles et de douloureuses :
Mon neveu est mort, lui qui m’a fait tant de conquêtes.
Les Saxons se soulèveront contre moi.
Les Hongrois, les Bulgares, tous les peuples ennemis,
Les Romains, ceux de Fouille et tous ceux de Palerme,
Et ceux d’Afrique, et ceux de Califerne.
Puis mes douleurs grandiront chaque jour.
Qui guidera mes armées avec une telle autorité
Quand celui qui avait coutume de nous commander est mort ?
Ah ! douce France ! que tu restes déserte !
J’ai si grand deuil que je voudrais n’être plus. »
Il se met à tirer sa barbe blanche,
Arrache à deux mains les cheveux de sa tête.
Cent mille Français se pâment contre terre.