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Page:La chanson de Roland - traduction 1911.djvu/34

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XL

« Beau sire Ganelon, a dit le Roi Marsile,
Je vous ai traité avec quelque légèreté
Quand, par fureur, je voulus vous frapper.
Je vous en fais réparation avec ces peaux de zibeline.
Elles valent plus de cinq cents livres en or,
Vous les aurez avant demain, c’est une belle compensation. »
Ganelon répond : « Je ne les refuse point :
S’il plaît à Dieu, qu’il vous rende la pareille ! »


XLI

« Ganelon, dit Marsile, tenez pour vrai
Que j’ai le désir de vous aimer très vivement.
Je veux vous ouïr parler de Charlemagne.
Il est bien vieux, il a usé son temps,
Il a plus de cent ans, que je sache.
Il a promené son corps par tant et tant de pays.
Il a reçu tant de coups sur son écu à boucle !
Il a réduit à mendier tant de riches souverains !
Quand donc sera-t-il las de batailler ainsi ? »
Ganelon répond : « Charles n’est pas fait ainsi.
Pas un de ceux qui le voient et qui ont appris à le connaître
Qui ne vous dise que l’Empereur est un vrai baron.
Je ne saurais assez l’estimer ni le priser,
Car nulle part, il n’y a plus d’honneur et de bonté
Qui pourrait dire quel est son vrai courage ?
Dieu l’a entouré d’une si radieuse vertu !
J’aimerais mieux mourir que quitter son baronnage. »


XLII

Le païen dit : « Je suis tout émerveillé
De ce Charlemagne qui est vieux et chenu :
Il a bien, que je sache, deux cents ans et plus.
Il a peiné de son corps par tant de royaumes,